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Charles Eisenstein

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L’extinction et la révolution de l’amour

July 7, 2020 by Charles Eisenstein

July 2020
Traduction de Marianne Souliez www.mariannesouliez.com. Il existe une version anglaise de cet essai.


1. Aucune demande n’est assez grande

 Contrairement à l’idée que le mouvement se fait de lui-même, Extinction Rébellion ne porte pas réellement sur le changement climatique. La question du climat sert plutôt de vecteur à l’expression d’un désir plus profond. Greta Thunberg et les jeunes qui se mettent en grève pour le climat incarnent le refus de se conformer à un système qui s’oppose à la vie. « Je n’irai pas à l’école. Je ne participerai pas à cela. Je ne veux pas faire partie de ce programme. »

Le cri d’alarme devant l’urgence climatique est une manière d’incarner une distanciation intuitive et inarticulée par rapport au projet de la civilisation tel qu’il est présenté. Il offre une cible au besoin d’identifier la source de tout ce qui va mal. Il canalise, en un point bien précis, l’aspiration révolutionnaire à tout changer. Mais si l’on se réveille demain en apprenant que la science s’est trompée et que les températures du globe se sont stabilisées, l’énergie qui motive les protestataires serait encore présente. Tout simplement parce qu’ils et elles ont bien vu que le défi auquel l’humanité est confrontée n’est pas : « Comment maintenir le statu quo en utilisant des carburants neutres en carbone ? ». Le statu quo n’est pas tolérable et changer de carburant ne résoudra rien. Comme les militants pour la paix des années 60, comme les manifestants anti-mondialisation des années 90, comme les participants d’Occupy Wall Street, ils et elles n’aspirent pas à de petites réformes, savent que les petites réformes ne vont pas assez en profondeur, admettent, consciemment ou non, que l’écocide est une caractéristique et non un dysfonctionnement du système socio-économique actuel, savent que nous pouvons faire mieux qu’un monde de pauvreté, d’inégalités, de guerres, de violences domestiques, de racisme et de destruction de l’environnement continuels. Et savent que chacun de ces éléments génère les autres.

En d’autres termes, la question n’est pas de savoir si notre civilisation actuelle est « durable ». Voulons-nous même la garder en l’état ? Est-ce le meilleur dont nous sommes capables ?

Lors de l’inauguration du camp Extinction Rebellion de Berlin en octobre dernier, j’ai lancé une hypothèse sur ce qui était réellement au cœur du mouvement. Ce que nous voulons vraiment, ai-je dit, c’est que l’humanité considère à nouveau la nature comme sacrée. Ce que nous voulons, c’est passer d’une société de domination à une société de participation, de passer de la conquête à la co-création, de l’extraction à la régénération, du mal à la guérison, et de la séparation à l’amour. Et nous souhaitons mettre en œuvre cette transition dans toutes nos relations : écologiques, économiques, politiques et personnelles. C’est pourquoi nous pouvons affirmer : « La révolution, c’est l’amour ».

Un tel objectif ne se décline pas facilement en revendications politiques. Toute demande que je pourrais formuler sera soit trop petite, soit trop grande. Si elle est envisageable sur le plan politique, la demande est trop modeste. Si la mettre en œuvre relève du pouvoir et de la volonté des autorités politiques existantes et si elle s’inscrit dans l’univers politique actuel, c’est qu’elle n’implique pas de changement fondamental. Au mieux, de telles demandes atténuent un symptôme ou suggèrent une direction que l’on pourrait suivre, une destination à laquelle on pourrait aspirer. Au pire, elles nous inciteraient à jouer une jolie musique pour nous distraire dans la marche qui conduit à la mort du monde.

Si en revanche nous formulons des exigences à la hauteur de l’ampleur du changement que nous souhaitons, alors dites-moi : à qui ces exigences doivent-elles être adressées ? Imagine-t-on que l’économie industrielle mondiale et l’appareil politique qui l’entoure sont un train de marchandises et qu’il suffit de demander à l’ingénieur de couper les gaz ? Les élites politiques et économiques sont aussi démunies que le reste du monde, soumises à des forces qui échappent à leur contrôle et qui, pour la plupart, dépassent leur conception. Ce que l’on veut vraiment – le monde plus beau que notre cœur sait possible et dont la possibilité non réalisée déclenchera une nouvelle rébellion à chaque génération, aucune autorité n’a le pouvoir de l’accorder. Cela ne veut pas dire que c’est impossible, ni que nous sommes incapables de nous mettre au service de son avènement. Ce que cela veut dire, c’est qu’il se peut qu’un discours de revendications ne soit pas approprié.

Le système basé sur les énergies fossiles a une inertie énorme. Il est omniprésent dans toutes les facettes de la vie moderne, de la médecine à l’agriculture, en passant par les transports, l’industrie et le logement. Tout militant ou militante doit comprendre qu’une demande de sortir des énergies fossiles est une demande de changement total, et qu’il est impossible de satisfaire cette demande. Son objectif n’est pas impossible : nous sommes bien au service d’un changement total. Mais celui-ci ne peut être obtenu sous la forme d’une revendication, car personne n’a le pouvoir d’y répondre.

Même les revendications explicites d’Extinction Rébellion sont impossibles à satisfaire par les instances actuelles du pouvoir. Regardez ce qui se passe lorsque des gouvernements augmentent les taxes sur les carburants. La hausse des prix du carburant déclenche des émeutes et des manifestations dans le monde entier, de la France à l’Équateur, du Zimbabwe à l’Indonésie, et les gouvernements doivent soit capituler, soit envoyer les troupes pour réprimer l’agitation des foules (ils font généralement les deux, car l’annulation de la hausse des prix ne peut apaiser l’agitation plus profonde qu’ils ont réveillée). Comme les énergies fossiles font partie intégrante de la société mondialisée, s’en éloigner implique un bouleversement total de la société. Il ne s’agit pas seulement de remplacer les énergies fossiles par le solaire, l’éolien et/ou la biomasse, en faisant éventuellement appel à des dispositifs de capture du CO2 et à des technologies de géo-ingénierie afin de réduire les émissions de CO2 et de permettre la poursuite du « business as usual » (la marche normale des affaires ?). Non. La succession de périodes chaotiques dans le climat, la répartition de l’utilisation des terres et les possibilités limitées d’approvisionnement en terres rares font que cette forme de sortie est irréalisable. Mais même si l’on pouvait poursuivre le « business as usual », est-ce vraiment ce que l’on souhaite ?

Si on transforme tout en revendication, on renforce les relations de pouvoir politique en place. On limite ce que l’on peut accomplir à ce que peuvent accorder les gens au pouvoir. On accorde ainsi du pouvoir à celles et ceux que nous tenons pour puissants, et on en fait inévitablement des ennemis lorsqu’ils ou elles ne parviennent pas à mettre en œuvre les actions de notre ultimatum.

Une revendication sous-entend une menace : « Faites ce que je dis, sinon…» Émettre une demande en s’appuyant sur la menace de la force ou tout du moins la menace de désagréments, à quelqu’un incapable de la satisfaire, c’est en faire un adversaire. Les mouvements qui agissent ainsi ont tendance à s’essouffler au fil du temps, et non à prendre de l’ampleur. Éloignés du public qu’ils essaient de sauver et incapables d’obtenir des résultats tangibles, ils se réduisent et finissent sous la forme d’un groupe de martyrs bien-pensants. On a vu ce schéma se reproduire de nombreuses fois. Invariablement, la police, en commettant des actes de brutalité dans le cadre du maintien de l’ordre, renforce cette attitude moralisatrice. Le débat se met à porter sur la question de savoir si la violence policière est justifiée, si les actions violentes sont justifiées à leur tour et enfin sur qui sont les bons et qui sont les méchants. Les manifestations elles-mêmes deviennent le centre du débat, et non le motif des manifestations. Les manifestants tentent de tirer parti de chaque violence policière pour faire pencher l’opinion publique de leur côté – nous sommes forcément les gentils : voyez les méfaits du gouvernement. Il s’ensuit une guerre médiatique, une lutte pour contrôler le récit. Au sein de leurs bulles médiatiques séparées et de l’éternelle réverbération des médias sociaux, chaque camp se convainc de plus en plus de sa propre vertu et de la turpitude de l’autre camp. Ainsi les deux camps mettent en scène le drame archétypal que l’on appelle la guerre, en adoptant l’hypothèse séculaire selon laquelle la clé de la résolution de tout problème est de vaincre un ennemi. On progresse en combattant, en luttant pour surmonter quelque chose. Comment ne pas voir que cette même mentalité de domination sous-tend l’écocide perpétré par la civilisation ? Nous sommes invités à une autre forme de révolution.

C’est confortable de décréter qu’un groupe d’ennemis est la clé pour résoudre une crise. On remplace un objectif que l’on ne sait comment atteindre (tout changer) par un objectif que l’on sait atteindre (faire tomber un dirigeant, renverser un gouvernement, prendre le pouvoir politique). Ainsi l’illusion du pouvoir détourne notre énergie révolutionnaire vers un objectif moindre. Si le mécanicien ne veut pas couper les gaz, eh bien on va le jeter hors du train et les couper nous-mêmes. Et probablement, comme la plupart des révolutionnaires, on ne parviendra aucunement à prendre le contrôle. Dans le cas peu probable d’une victoire, rendus dans la salle des machines, on découvrirait que nous sommes tout aussi incapables de couper les gaz que l’occupant précédent.

Cela ne veut pas dire qu’il faille abandonner et rentrer chez nous. Faisons confiance à l’espoir. L’espoir authentique ne nous distrait pas de la réalité, il est la prémonition d’une possibilité. Pour l’atteindre, il faut sortir du cercle vicieux habituel de problème-solution, où chaque solution recrée le même problème sous une autre forme. Le diagnostic conventionnel de la question du changement climatique fait lui-même partie du problème, et il en va de même pour les solutions qui en découlent. En sortant de ce cercle vicieux, on peut aboutir à des revendications différentes et, plus important encore, à des moyens de répondre à la crise qui échappent à l’état d’esprit qui réclame.

 

2. L’exclusion et le réductionnisme carbone

L’incapacité de nos dirigeants à faire des changements significatifs reflète l’incapacité de la population. J’ai entendu que quelques manifestants londoniens avaient réussi à arrêter une rame de métro. Ils et elles pensaient sans doute que les désagréments subis par les passagers n’étaient rien comparés au fait de sauver la race humaine de l’extinction. Il faut une action spectaculaire ! Pourquoi pas un grand boycott de tous les transports fonctionnant aux combustibles fossiles ? Eh bien les passagers n’étaient pas d’accord. L’un d’eux a lancé : « Et si jamais j’étais en route pour l’hôpital, y avez-vous pensé ? » Beaucoup étaient issus de la classe ouvrière et prenaient les transports pour se rendre à leur gagne-pain. Dans une mesure plus ou moins grande, la plupart des gens ont une vie liée à la machine qui détruit le monde. Faire appel à la vertu individuelle pour persuader les gens de consommer moins, d’utiliser moins d’énergie, de moins prendre la voiture, est vain s’ils vivent dans un système qui les oblige à consommer, à utiliser de l’énergie et à rendre leur voiture simplement pour pouvoir survivre.

Les tactiques de blocage éloignent les personnes qui en souffrent, car elles communiquent « Nous sommes prêts à vous sacrifier pour la Cause. Nous sommes là pour vous sauver – que cela vous plaise ou non ! » Ce faisant, les manifestants recréent dans leurs relations publiques la dynamique d’affrontement eux-contre-nous qui caractérise leurs relations avec les autorités.

Voyez-vous d’autres contextes où certains doivent être sacrifiés, contre leur gré, pour le plus grand bien ? Où certains êtres sont simplement en travers de la route du progrès ? Où l’on passe outre à la liberté d’une personne sans son consentement ? Cela ne veut pas dire qu’il faille obtenir le consentement de toutes les personnes concernées avant de lancer une action de protestation. Il s’agit simplement de les prendre en compte. De s’arrêter un instant pour voir le monde à travers leurs yeux, et comprendre la manière dont elles vivent. C’est faire preuve d’empathie. L’empathie n’est pas disponible lorsque le brouillard du jugement obscurcit le cœur.

La méfiance du public à l’égard des militants est renforcée par l’attitude moralisatrice sous-entendue dans les appels à la vertu individuelle. Si notre militantisme et nos modes de vie à faible empreinte carbone nous rendent vertueux à nos propres yeux, si l’on se félicite d’être du bon côté de la morale, on propulse les autres dans les rangs des personnes sans morale, ignares et malavisées. Plus on se drape dans le manteau de la vertu, plus on dégage un air de petit saint. Nous serions plus efficaces si, au lieu de nous murer dans un jugement sans pitié, nous cherchions à vraiment comprendre la totalité des circonstances de ceux que nous jugeons. C’est ce qu’on appelle l’inclusivité. C’est la porte d’entrée vers une révolution de l’amour.

Une grande partie du caractère exclusif de la mouvance environnementale découle d’avoir ramené tout ce qui est « vert » à la comptabilité carbone – une dangereuse simplification qui laisse de côté les êtres, y compris les êtres humains, qui semblent ne pas « compter ». Quelle est l’empreinte carbone des baleines ? Des tortues de mer ? Des usagers du métro ? Des sans-abris ? Des prisonniers ? Des rossignols ? Des hiboux ? Des loups ? Quand apprendrons-nous que les êtres que nous laissons de côté finissent par être les plus importants ? Quand apprendrons-nous que nous sommes tous dans le même bateau ? Nous ne sommes pas dans le genre de révolution où l’on sacrifie certains êtres pour « la cause » de sauver le monde, nous sommes dans une révolution où l’on reconnaît que la guérison viendra en accordant de la valeur à ce et ceux qui sont dévalorisés. En effet, la nature n’est-elle pas ce que l’on a exclu et dévalorisé le plus ? Accorder une valeur aux êtres de la nature en se basant sur le CO2, une quantité mesurable soumise aux habituelles analyses coûts-bénéfices, revient quasiment à leur accorder une valeur monétaire. Tout et tous ceux qui ne sont pas pris en compte dans cette estimation reviendront nous hanter, car la vérité est que tous sont importants pour maintenir les conditions d’une biosphère abondante et florissante.

Qu’est-ce qui est dévalorisé quand on se contente de comptabiliser le CO2 ? Qu’est-ce qui n’est pas compté ? Eh bien les écosystèmes, par exemple. Pour développer les technologies à « énergie verte » comme les panneaux solaires, les batteries, les éoliennes et les véhicules électriques, il faudrait une énorme augmentation de l’exploitation minière. Savez-vous à quoi ressemble une grande mine ? Ce n’est pas un trou inoffensif percé dans le sol. Voici une description de la mine d’argent de Peñasquito au Mexique :

L’ampleur du chantier, qui s’étend sur près de 100 kilomètres carrés, est impressionnante : un vaste complexe de mines à ciel ouvert qui éventre les flancs des montagnes, flanqué de deux décharges d’un kilomètre de long chacune, et d’une digue de résidus remplie de boues toxiques retenue par un mur de 15 kilomètres de circonférence aussi haut qu’un gratte-ciel de 50 étages. Cette mine produira 11 000 tonnes d’argent en 10 ans avant que ses réserves, les plus importantes du monde, ne disparaissent.

Pour faire passer l’économie mondiale aux énergies renouvelables, nous devons mettre en service près de 130 mines supplémentaires de l’échelle de celle de Peñasquito. Et ça, c’est simplement pour l’argent.

On a besoin de mines semblables pour répondre à la demande croissante des énergies renouvelables en cuivre, en néodyme, en lithium, en cobalt et en autres minéraux. Chacune d’entre elles diminue d’autant la surface des forêts et des autres écosystèmes, empoisonne les nappes phréatiques et génère de grandes quantités de déchets toxiques. Chacune engendre une misère sociale indicible en parallèle de la misère écologique, et des manœuvres géopolitiques similaires à celles qui entourent l’extraction du pétrole. Il suffit de voir le coup d’état dissimulé en Bolivie, pays qui possède d’énormes réserves de lithium que le président évincé, Evo Morales, avait prévu de nationaliser.

Lorsqu’elles sont déployées à l’échelle industrielle, les autres principales sources d’énergie renouvelable (les barrages et la biomasse) ont même peut-être un impact écologique plus désastreux que l’exploitation minière, causant des déplacements de population et la destruction d’écosystèmes. Cela n’est certainement pas notre intention, à nous écologistes, de convertir l’ensemble du biote de la Terre en carburant et la totalité de ses rivières en centrales électriques.

Je m’adresse à ceux qui se soucient de cette planète : s’il vous plaît, faites attention à ce que vous demandez. Prenez garde à ne pas faire de mauvaises revendications, des revendications trop modestes qui en réalité ne changeront absolument rien et qui pourraient causer plus de mal que de bien. Méfiez-vous des solutions toutes faites qui s’invitent en réponse à la pression et l’urgence qui habite vos actions. Certaines pourraient aggraver la situation, celles que le pouvoir en place estime acceptables car elles ne menacent pas ses fondements.

Il n’y a aucun doute que l’extraction des énergies fossiles cause des dégâts abominables à la terre et à l’eau, indépendamment du CO2. Peut-être devrions-nous transférer le focus du carbone, qui exclut les énergies fossiles mais autorise toutes sortes d’autres dégâts, vers l’écocide, qui exclut les unes et les autres et définit un nouveau standard bien différent de ce qui est “vert“.

Il est temps de défendre une transition plus profonde que celle que peuvent englober les mesures liées au CO2. De quel changement a-t-on besoin pour être convaincu que l’écocide est ce que ce mot signifie : un meurtre ?

Les causes profondes du changement climatique sont identiques aux causes profondes de la plupart des violences, injustices et dégâts écologiques survenant sur la planète. Certains disent que cette cause est le capitalisme, mais les anciens pays socialistes étaient tout aussi avides que les pays capitalistes, sinon plus. Voici ma proposition : la cause profonde de l’écocide est l’histoire qui raconte le monde dans la civilisation moderne. Je l’appelle l’Histoire de la Séparation : l’histoire selon laquelle je suis séparé de vous, l’humanité est séparée de la nature, l’esprit est séparé de la matière, et l’âme est séparée de la chair ; histoire selon laquelle l’être humain est seul détenteur de la pleine existence et de la pleine conscience. Son destin est par conséquent de s’élever grâce à la maîtrise des forces mécaniques de la nature afin d’imposer un ordre intelligent sur un monde qui en est dépourvu. L’Histoire de la Séparation imprègne le capitalisme actuel. Elle est l’échafaudage de tous nos systèmes. Elle reflète la psychologie qui s’est adaptée à ces systèmes. Chacun d’eux – l’histoire, le système et la psychologie – perpétue les deux autres.

La première exigence d’Extinction Rébellion est que le gouvernement dise la vérité sur le changement climatique, mais celui-ci connaît-il même la vérité ? Qui est prêt à affirmer la vérité que la Terre est vivante ? Que la cause des dégâts écologiques réside dans les histoires les plus profondes que la civilisation se raconte ? Qui est prêt à dire la vérité sur ce que cette crise nous demande, c’est à dire une transformation totale, une initiation à un nouveau type de civilisation ?

 

3. Une Planète Vivante

Dans un chemin de vie, une initiation commence par une crise qui dissout ce que l’on sait et ce que l’on était. Des décombres de l’effondrement qui s’ensuit, un nouveau moi naît au sein d’un nouveau monde.

Une société peut également traverser une initiation. C’est ce que le changement climatique propose à la civilisation planétaire actuelle. Il ne s’agit pas d’un simple “problème” que l’on peut résoudre à partir de la vision du monde qui prévaut et de son catalogue de solutions ; c’est une invitation qui nous demande de nous installer dans une nouvelle Histoire du Peuple et dans une nouvelle (et ancienne) forme de relation avec le reste du vivant.

Un élément clé de cette transformation est le passage d’une vision géo-mécanique du monde à une vision du monde que j’appellerai celle de la Planète Vivante. La crise climatique ne sera pas résolue en ajustant des niveaux de gaz dans l’atmosphère, comme on bricole le mélange air-carburant d’un moteur diesel. C’est plutôt qu’une planète vivante ne peut être en bonne santé – et d’ailleurs ne peut rester en vie – que si ses organes et ses tissus sont vivants. Ceux-ci comprennent les forêts, le sol, les zones humides, les récifs coralliens, les poissons, les baleines, les éléphants, les prairies sous-marines, les mangroves et tous les autres systèmes et espèces de la Terre. Si l’on continue à les dégrader et à les détruire, alors, même si on réduit les émissions à zéro du jour au lendemain, la Terre mourra malgré tout, lacérée d’un million de blessures.

Pourquoi ? Parce que c’est la vie qui maintient les conditions propices à la vie, au travers de processus encore mal compris, aussi complexes que ce qui habite toute physiologie vivante. La végétation produit des composés volatils favorisant la formation de nuages qui réfléchissent la lumière du soleil. La mégafaune (les grands animaux) transporte l’azote et le phosphore au travers des continents et des océans pour entretenir le cycle du carbone. Les forêts génèrent une pompe biotique de basse pression constante qui attire la pluie au milieu des continents et maintient les flux atmosphériques. Les baleines font remonter des nutriments des profondeurs de l’océan pour nourrir le plancton. Les loups contrôlent les populations de cerfs afin que les sous-bois restent sains, ce qui améliore l’absorption des précipitations et évite les sécheresses et les incendies. Les castors ralentissent la progression de l’eau de la terre vers la mer, en amortissant les inondations et en régulant le déversement du limon dans les eaux côtières afin que la vie puisse y prospérer. Les oiseaux migrateurs et les poissons tels que le saumon transportent les nutriments marins vers l’intérieur des terres, ce qui permet d’entretenir les forêts. Les tapis de mycélium relient de vastes zones en un réseau neuronal d’une complexité supérieure à celle du cerveau humain. Et tous ces processus sont imbriqués les uns dans les autres.

Dans mon livre Climate – A New Story, je fais valoir qu’une grande partie du dérèglement climatique que l’on attribue aux gaz à effet de serre provient en fait de perturbations directement causées aux écosystèmes. Cela se produit depuis des millénaires : partout où l’homme a détruit des forêts et exposé le sol à l’érosion, la sécheresse et la désertification ont suivi. Comme il est tentant d’accuser les émissions de gaz à effet de serre et de perpétuer notre culture matérialiste en utilisant des énergies renouvelables !

Au moment où j’écris ces lignes, l’Australie est victime de vagues de chaleur, d’incendies et d’une sécheresse catastrophiques sans précédent. Par ailleurs, depuis plusieurs années, ce pays abat 5 000 kilomètres carrés d’arbres par an. Encore une fois, Comme il est tentant de mettre tout cela sur le compte des émissions mondiales de CO2 !

L’expression “perturbation des écosystèmes” fait très scientifique par rapport à “blesser et tuer des êtres vivants“. Mais si l’on se place dans la vision de la Planète Vivante, la deuxième expression est la plus précise. Une forêt n’est pas seulement un ensemble d’arbres vivants ; elle est elle-même vivante. Le sol n’est pas seulement un milieu où la vie se développe ; le sol est vivant. Il en va de même d’une rivière, d’un récif et d’une mer. Tout comme il est beaucoup plus facile de rabaisser, d’exploiter et de tuer une personne lorsque l’on considère sa victime comme moins qu’humaine, il est également plus facile de tuer les êtres habitant cette planète lorsqu’on les considère comme non-vivants et non-conscients. Les coupes à blanc, les mines à ciel ouvert, les marécages asséchés, les marées noires, etc. sont inévitables lorsque l’on conçoit la Terre comme une chose morte, insensible, comme un tas de ressources à exploiter.

Nos histoires sont puissantes. Si on perçoit le monde comme mort, on le tue. Et si on voit le monde comme vivant, on apprend à être au service de sa guérison.

***

Le monde est vivant. Il n’est pas seulement l’hôte de la vie. Les forêts, les récifs et les zones humides sont ses organes ; les eaux son sang, le sol sa peau, les animaux ses cellules. Ce n’est pas une analogie exacte, mais la conclusion à laquelle elle invite est pertinente : si ces êtres perdent leur intégrité, la planète entière dépérit.

Je ne vais pas m’évertuer à faire un plaidoyer intellectuel en faveur de la thèse que la planète Terre est vivante, qui dépendrait de la définition de la vie que j’utiliserais. De plus, j’aimerais aller plus loin et déclarer que la Terre est également consciente, intelligente et capable de ressentir – une affirmation scientifiquement invérifiable. Par conséquent, au lieu d’essayer d’argumenter, je vais demander au sceptique de se planter pieds nus sur la Terre et de ressentir la vérité de cette affirmation. Je crois que, quel que soit son degré de scepticisme, quelle que soit l’ardeur avec laquelle on croit que la vie n’est qu’un accident chimique fortuit provoqué par des forces physiques aveugles, en chaque personne brûle une flamme qui sait que la terre, l’eau, le sol, l’air, le soleil, les nuages et le vent sont vivants et conscients, qu’ils nous ressentent, tout comme nous les ressentons.

Je connais bien le sceptique, car lui et moi ne faisons qu’un. Un doute sournois s’empare de moi quand je passe trop de temps entre quatre murs, devant un écran, entouré d’objets inorganiques standardisés qui reflètent l’aspect inanimé de la conception moderniste du monde.

Il est certain que l’exhortation à se connecter pieds nus à la Terre vivante serait déplacée pendant une conférence universitaire sur le climat ou une réunion du GIEC. Il arrive parfois que de tels événements autorisent une cérémonie gentillette ou sortent de leur manche un autochtone pour invoquer les quatre directions avant que tout le monde n’entre dans la salle de conférence pour se mettre au véritable travail, celui des données et des graphiques, des modèles et des projections, des coûts et des bénéfices. Dans ce monde, ce qui est réel ce sont les chiffres. Ce genre de cadre – fait d’abstractions quantitatives, d’air conditionné, de lumière artificielle permanente, de chaises toutes identiques et uniquement d’angles droits – bannit toute forme de vie mis à part l’être humain. La nature n’existe que nous forme de représentation, et la Terre ne semble vivante qu’en théorie, voire probablement pas du tout.

« Dans ce monde, ce qui est réel ce sont les chiffres. » Quelle ironie, étant donné que les chiffres sont l’abstraction à son extrême. Quand les problèmes sont définis par des chiffres, l’esprit « réaliste » cherche à les résoudre également avec des chiffres. Mon matheux intérieur adorerait résoudre la crise climatique en évaluant toutes les mesures politiques possibles en fonction de leur empreinte carbone. A chaque écosystème, à chaque technologie, à chaque projet énergétique, j’attribuerais une valeur en termes d’émissions de gaz à effet de serre. Puis je donnerais l’ordre d’avoir plus de celui-ci et moins de celui-là, je compenserais les déplacements en avion par la plantation d’arbres, la destruction de zones humides ici par des panneaux solaires là-bas, le tout pour rentrer dans un certain budget de gaz à effet de serre. J’appliquerais les méthodes et mentalités développées dans la comptabilité financière – l’argent étant une autre façon de réduire le monde à des chiffres (dans le monde de la finance aussi les chiffres sont ce qui est réel).

Malheureusement, comme pour l’argent, le réductionnisme carbone laisse de côté tout ce qui ne semble pas avoir d’effet sur le bilan comptable. C’est ainsi que les questions environnementales traditionnelles telles que la préservation de la faune sauvage, la protection des baleines ou le nettoyage des déchets toxiques sont négligées dans le mouvement pour le climat. « Vert » est devenu synonyme de « à faible émission de gaz à effets de serre ».

Dans la vision de la Planète Vivante c’est une erreur monumentale car les baleines, les loups, les castors, les papillons, etc. qui sont négligés font partie des organes et des tissus qui préservent l’intégrité de Gaia. En compensant les kilomètres parcourus en avion par la plantation d’arbres, en s’approvisionnant en électricité grâce à des panneaux solaires, et en se parant ainsi de l’habit « écologique », nous apaisons notre conscience tout en occultant les dégâts qu’entraîne chaque jour notre mode de vie actuel. On sous-entend que « durable » signifie que l’on s’arrange pour que la société telle que nous la connaissons perdure, mais avec des sources de combustibles non fossiles. C’est pourquoi les pouvoirs en place ont si facilement adopté le discours sur le climat que j’appelle le réductionnisme carbone. Même les entreprises de combustibles fossiles sont d’accord car cela signifie qu’elles peuvent continuer leurs activités pourvu que des technologies de capture du CO2 et de géo-ingénierie soient mises en place.

La véritable menace qui pèse sur la biosphère est en fait bien pire que ce dont la plupart des gens ont conscience, même à gauche ; elle inclut et va bien au delà du climat, et on ne pourra y faire face que grâce à une réponse curative multidimensionnelle. La Terre se meurt d’une défaillance d’organes. Le naturaliste J.B. MacKinnon, dit que nous vivons dans « un monde à dix pour cent », la statistique poétique dont il se sert pour décrire la destruction de la vie sur Terre qui a commencé avec les premières grandes civilisations et s’est accélérée avec l’ère industrielle et continue de nos jours. Il reste peut-être aujourd’hui 10% de la population de baleines d’avant la chasse à la baleine commerciale. Environ 10% des grands poissons prédateurs. La moitié des mangroves d’Asie. 20% des prairies sous-marines de l’Atlantique. 1% des forêts vierges d’Amérique du Nord, et la moitié du nombre d’arbres dans le monde. Au cours de ma vie j’ai été témoin d’un déclin de 30 % de la population d’oiseaux et d’un déclin de 50 à 80 % des insectes. Et la liste continue.

Ce serait bien pratique de pouvoir mettre tout cela sur le compte d’une seule cause, à savoir le changement climatique. Nous pourrions alors déployer nos efforts sur le terrain familier du réductionnisme. En principe, nous saurions quoi faire. Mais lorsque la cause comprend une multitude de facteurs – herbicides, insecticides, pollution sonore, pollution électromagnétique, déchets toxiques, résidus pharmaceutiques, aménagement du territoire, érosion des sols, surpêche, destruction des forêts, épuisement des réserves aquifères, élimination des grands prédateurs et effets de serre, chacun interagissant en synergie avec les autres – alors il n’existe pas de solution unique. C’est inconfortable de ne pas savoir quoi faire. C’est tentant de s’évader dans l’illusion d’une cause unique. Mais il vaut mieux ne pas savoir que penser, à tort, que l’on sait.

 

4. Des nouvelles priorités

Avec des écosystèmes sains, des niveaux élevés de CO2, de méthane et de température pourraient ne poser que peu de problèmes. Après tout, au début de l’Holocène les températures étaient plus élevées qu’aujourd’hui, de même qu’au cours des épisodes chauds minoen, romain et médiéval, et pourtant à l’époque il n’y avait pas de boucle de rétroaction causée par des émanations de méthane ou autre phénomène du même genre. Un être vivant doté d’organes solides et de tissus sains est résilient.

Malheureusement, les organes de la Terre ont été endommagés et ses tissus ont été empoisonnés. Elle est aujourd’hui dans un état fragile. C’est pourquoi il est important de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Cependant, la vision de la Planète Vivante invite un ordre de priorités différent de celui du discours conventionnel sur le climat. Et nombre de ces priorités pourraient se traduire par des revendications et des politiques concrètes que les gouvernements, les entreprises et les particuliers pourraient adopter dès maintenant, avec des effets locaux tangibles.

La première priorité est de protéger toutes les forêts tropicales primaires qui existent encore ainsi que les autres écosystèmes intacts, comme les grandes prairies, les récifs coralliens, les mangroves, les prairies sous-marines et autres zones humides. Tous les écosystèmes vierges sont de précieux trésors. Ils sont des réservoirs de biodiversité, des serres de régénération pour la vie. Ils renferment l’intelligence profonde de la terre, sans laquelle une guérison complète est impossible. C’est là que subsiste la mémoire de la santé de Gaia. Au moment où j’écris ces lignes, la forêt amazonienne est sauvagement agressée, et l’état de la deuxième plus grande forêt tropicale, le Congo, est bien pire. La troisième plus grande, celle de Nouvelle-Guinée, est également gravement menacée par l’exploitation forestière et les plantations d’huile de palme. Dans le récit qui accorde la priorité au carbone, ces lieux sont déjà importants ; dans le récit de la Terre Vivante, ce sont des organes vitaux. Si le récit du carbone sert à les protéger, alors très bien, mais il ne faut pas répandre l’idée que leur valeur est réductible à leur capacité à stocker le dioxyde de carbone.

La deuxième priorité est de réparer et de régénérer les écosystèmes endommagés dans le monde entier. Les moyens d’y parvenir sont notamment les suivants :

  • L’agrandissement massif des réserves marines pour régénérer les océans.
  • L’interdiction du chalutage en eaux profondes, des filets dérivants et des autres pratiques de pêche industrielle
  • Les pratiques agricoles régénératrices qui reconstituent les sols, telles que le couvert végétal, la culture de plantes vivaces, l’agroforesterie et le pâturage holistique
  • Le boisement et le reboisement
  • La construction de relief propices à la rétention d’eau afin de réparer le cycle hydrologique
  • La réintroduction et la protection des espèces clés, des grands prédateurs et de la mégafaune

Pour une régénération efficace, on ne peut s’appuyer sur des formules applicables à grande échelle. Chaque lieu est unique. Ce qui fonctionne dans une vallée ou dans une ferme peut ne pas fonctionner dans celle d’à côté. Lorsque l’on considère les lieux et les écosystèmes de cette planète comme des êtres vivants et non comme des ensembles de données, on se rend compte qu’il faut connaître chacun intimement. La science quantitative peut contribuer au développement de ces connaissances, mais elle ne peut se substituer à l’observation rapprochée et qualitative menée par les agriculteurs et les populations locales qui interagissent quotidiennement et depuis plusieurs générations avec le paysage.

La profondeur et la subtilité des connaissances des chasseurs-cueilleurs et des paysans traditionnels sont difficiles à appréhender pour l’esprit scientifique. Ces connaissances, encodées dans les histoires culturelles, les rituels et les coutumes, font de ceux qui les cultivent des parties intégrantes des organes de la terre et de la mer afin qu’ils puissent participer à la résilience de la vie sur Terre. Malheureusement, une grande partie de ce qui est appelé « développement » – même le développement durable – sape leur mode de vie et les engloutit dans l’économie marchande mondialisée. Lorsque « développement » équivaut à « intégration dans l’économie mondiale », les devises qui permettent de rembourser les prêts au développement et d’importer de la haute technologie ne peuvent venir que de l’exportation des ressources naturelles, via l’exploitation forestière, l’extraction minière et l’agriculture industrielle. Ainsi, les deux premières priorités exigent de réinventer le paradigme du développement dans son ensemble, ainsi que le système financier qui lui est associé.

La troisième priorité est de cesser d’empoisonner la planète avec des pesticides, des herbicides, des insecticides, des plastiques, des déchets toxiques, des métaux lourds, des antibiotiques, de la pollution électromagnétique, des engrais chimiques, des résidus pharmaceutiques, des déchets radioactifs et autres polluants industriels. Ces substances affaiblissent les tissus de la Terre et pénètrent dans toute la biosphère au point que, par exemple, on trouve maintenant des orques dont les niveaux de PCB sont suffisamment élevés pour qualifier leur corps de déchets toxiques. Les insecticides néo-nicotinoïdes pénètrent dans les systèmes terrestres, entraînant une chute des populations d’insectes et, par conséquent, un déclin des oiseaux et du reste du réseau alimentaire. Dans les océans, le plancton, qui est la base de la chaîne alimentaire, est attaqué sur plusieurs fronts, par les ruissellements agricoles, la pollution chimique, les études sismiques et le massacre des prédateurs au sommet de la chaîne. Dans de vastes zones agricoles, le sol est pratiquement mort, n’est plus que de la poussière, après des décennies d’utilisation d’engrais chimiques et de pesticides. D’immenses étendues de terre sur différents continents sont régulièrement pulvérisées avec des insecticides dans l’espoir de contrôler les vecteurs de maladies ou les espèces envahissantes. Le biote de la terre est constamment attaqué.

La quatrième priorité est de réduire les niveaux de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Les changements brusques de la composition de l’atmosphère exercent une pression accrue sur les systèmes planétaires, déjà dangereusement affaiblis par le développement des activités humaines, l’industrie extractive et la pollution. Les écosystèmes, en particulier les forêts, les savanes et les zones humides, qui autrefois maintenaient en place des schémas de circulation de flux sont gravement endommagés. Entre temps, les gaz à effet de serre ont intensifié le flot thermodynamique du système Terre, ce qui a davantage perturbé les schémas atmosphériques et endommagé les écosystèmes déjà affaiblis. Cependant, même en l’absence de hauts niveaux de gaz à effet de serre, la destruction massive de la vie annonce un désastre. Les émissions dues aux combustibles fossiles intensifient une situation déjà dégradée.

S vous êtes troublé par le fait que je place la réduction des gaz à effet de serre loin en quatrième priorité, intégrez le fait que la réduction des émissions est un sous-produit inévitable des trois autres priorités. D’une part, pour véritablement protéger et réparer les écosystèmes, il faudrait un moratoire sur les nouveaux oléoducs, les puits de pétrole offshore, les exploitations de gaz et pétrole de schiste, l’extraction des sables bitumineux, les mines à déplacement de sommet, les mines à ciel ouvert et autres formes d’extraction de combustibles fossiles, car toutes ces activités entraînent des gros dégâts et de gros risques écologiques. Pour aimer et prendre soin de toutes les précieuses parties de cette planète, nous devons transformer l’infrastructure des combustibles fossiles, indépendamment de la question des gaz à effet de serre.

De plus, le reboisement et l’agriculture régénératrice peuvent séquestrer des énormes quantités de carbone. Les estimations varient considérablement quant à la quantité de carbone que peuvent séquestrer les pâturages holistiques et l’horticulture biologique sans labour, mais les meilleurs praticiens comme Allan Savory, Gabe Brown et Ernst Gotsch parviennent à atteindre jusqu’à 8-20 tonnes par hectare par an, tout en égalant ou en dépassant les producteurs conventionnels en termes de productivité, la plupart du temps sans produits chimiques. Étant donné que près de 5 milliards d’hectares de terres sont en pâturage ou en culture dans le monde, il suffirait de faire passer 10 à 25 % de ces surfaces à ces méthodes pour compenser 100 % des émissions mondiales actuelles. Certes, tous les agriculteurs ou éleveurs n’auront pas immédiatement le même succès que les innovateurs talentueux comme Savory, Brown ou Gotsch, mais le potentiel est énorme. De plus les climatosceptiques peuvent eux-aussi défendre ces pratiques pour leurs effets bénéfiques sur la biodiversité, les aquifères et le cycle de l’eau. Un sol sain absorbe les précipitations comme une éponge, atténuant ainsi les inondations, puis, par évapo-transpiration, les libère dans l’air progressivement, prolongeant ainsi la saison des pluies et transportant la chaleur de la surface vers l’atmosphère où elle rayonne davantage dans l’espace. Il contribue ainsi au refroidissement et à la résilience face au changement climatique.

Paradoxalement, nous n’avons pas besoin de revendiquer l’argument de l’effet de serre pour réduire les gaz à effet de serre. Les priorités énumérées ci-dessus proposent une myriade d’objectifs concrets et réalisables de protection et de régénération qui, additionnés, pourraient dépasser ce que réclame le mouvement de défense du climat, mais avec des motivations différentes. Cependant il existe des divergences importantes. L’approche Planète Vivante bannit les grands projets hydroélectriques parce qu’ils détruisent les zones humides, dégradent les rivières et modifient la circulation du limon vers la mer. Elle abhorre les plantations de biocarburants qui envahissent de vastes régions d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud, car ces plantations remplacent souvent les écosystèmes naturels et l’agriculture paysanne durable à petite échelle. Elle redoute les projets de géo-ingénierie tels que le blanchiment du ciel avec des aérosols sulfurés. Elle n’a guère besoin de machines géantes aspirant le CO2 (technologies de capture et de stockage du CO2). Elle regarde avec horreur la consommation des forêts du monde entier pour produire des copeaux de bois destinés à des centrales au charbon reconverties. Elle se méfie de la mise en place d’énormes éoliennes qui tuent les oiseaux et de vastes réseaux photovoltaïques dans des paysages vides.

Savoir que la Terre est vivante, c’est faire un pas vers l’état d’esprit où on la considère de nouveau comme sacrée. C’est faire un pas vers la révérence pour tous les êtres. N’est-ce pas véritablement le but du Mouvement pour le Climat ?

 

5. La dette et la guerre

La révérence pour tous les êtres est la base d’une révolution de l’amour. Sans révérence, on rebat les cartes sans changer de jeu. La victime devient l’agresseur, l’agresseur devient la victime, la colère se mue en haine, la justice se mue en châtiment, de la défaite naît la vengeance, et de la victoire naissent de nouveaux ennemis.

La révérence sous-tend les quatre priorités exposées plus haut, et celles-ci ne sont pas et ne peuvent pas être séparées des autres dimensions de la guérison du monde. Toute question de justice sociale, politique, économique, raciale ou sexuelle, toute restauration de la pleine humanité de celles et ceux qui en ont été dépouillés, peuvent leur être juxtaposées, non comme des ajouts politiquement corrects, mais comme des composantes structurelles d’un même édifice. Aucune ne peut se passer des autres. Parmi celles-ci, cependant, il y en a deux à qui je voudrais octroyer un statut spécial, car elles donnent le ton et servent de modèle pour tous les autres : la dette et la guerre.

Imaginez que vous êtes un pays, disons l’Équateur. La communauté mondiale vient vers vous sous la forme d’un homme brandissant un drapeau de la Terre et vous dit : « Protégez vos forêts tropicales ! Protégez vos rivières, vos zones humides et vos sols! Le destin du monde en dépend ». Puis il pose le drapeau et sort un pistolet, le met sur votre tempe et ajoute : « Mais vous devez continuer à payer vos dettes », sachant pertinemment que la seule façon d’y parvenir est de liquider précisément ces forêts tropicales, ces rivières, ces zones humides et ces sols. Refusez, et la punition frappe comme l’éclair. Le marché obligataire international vous abandonne. Votre monnaie s’effondre. Les multinationales et leurs alliés des États nations changent votre gouvernement. Le nouveau, célébré comme étant « démocratique », instaure l’austérité, supprime les obstacles au pillage écologique et est récompensé par de nouveaux prêts au développement.

Rien de tout cela n’est dû à la vilenie des banquiers, des bureaucrates, des impérialistes militaires ni à la cabale d’Illuminati ou d’extraterrestres reptiliens qui dirigent les affaires mondiales en coulisses. Tout cela se produit afin de répondre à une nécessité systémique de croissance économique. Un système monétaire basé sur une dette portant intérêt exige une croissance sans fin pour fonctionner et génère une pression sans fin sur tous ses participants afin qu’ils fassent quelque chose, n’importe quoi, pour convertir davantage de nature en produits et en propriété, et davantage de relations en services.

Je plaisantais (en quelque sorte) en parlant d’extraterrestres reptiliens. Bien sûr ce serait pratique d’identifier quelque chose, ou quelqu’un, que l’on pourrait combattre et dominer pour sauver le monde. Vaincre le mal est la plus vieille recette, une solution séduisante, une fausse solution qui masque la complexité et atténue le malaise de ne pas savoir quoi faire. Si le Mal était effectivement aux commandes du monde, il lui suffirait d’installer un système monétaire basé sur l’intérêt, de s’asseoir calmement et de regarder naître le chaos.

Mon livre Sacred Economics (L’Économie Sacrée) est l’un des nombreux ouvrages qui décrivent ce qui doit changer pour que l’économie rejoigne l’écologie. Une économie post-croissance est possible, qui comprenne le progrès en d’autres termes que la croissance, et la richesse en d’autres termes que la quantité. Pour l’instant je vais me contenter de mentionner un premier pas dans cette direction, quelque chose que nous pourrions, un jour prochain, exiger : une annulation à grande échelle de la dette. N’importe quel passager du métro sait ce qu’est la dette, et elle est au cœur du fonctionnement de la machine de la croissance qui consomme le monde.

La machine de la croissance introduit les relations mercantiles dans tous les secteurs de la vie. Dans une relation mercantile, chaque partie essaie d’obtenir la meilleure affaire, tandis que les autres êtres deviennent des instruments de son propre intérêt. La base relationnelle est donc l’hostilité. La dette, en particulier, est une forme de « pouvoir sur l’autre ». Comme le dit David Graeber, derrière l’homme qui tient le livre des comptes se tient toujours un homme qui porte une arme.

La séparation et la domination inhérentes aux relations économiques fondées sur la dette deviennent extrêmes dans le phénomène de la guerre. L’industrie de la guerre consomme de grandes quantités d’argent, d’énergie et de matériel, mais la plus grande menace pour l’avenir réside dans la fragmentation de la volonté collective de l’humanité. Pour changer de cap et nous diriger vers la guérison du monde il nous faudra de la solidarité et de la cohérence dans nos objectifs. Si nos énergies créatives et nos forces vitales sont dissipées à nous battre les uns contre les autres, que restera-t-il pour mettre en œuvre cette puissante transformation ? Notre navire a été aspiré dans un tourbillon. Il est possible d’y échapper si tout le monde tire sur les rames, mais au lieu de cela l’équipage se bat sur le pont alors que le navire court à sa perte.

Tant que la guerre sous toutes ses formes fera rage sur cette planète, aucune des quatre priorités de la Planète Vivante ne se réalisera. Lorsque la révérence est la source de la révolution, le véritable révolutionnaire est celui qui travaille pour la paix. La pensée guerrière génère un climat psychique incapable d’accueillir la révérence, car elle déshumanise l’ennemi et exclut du cercle d’empathie tout être qui se met en travers de l’effort de guerre. C’est ainsi que l’économie moderne a fait de la nature un objet et a exclu du cercle de l’empathie tout être qui se met en travers du chemin du profit.

La réflexion sur la guerre va bien au-delà du conflit militaire. L’intense polarisation politique actuelle est une autre de ses expressions. La division en camps opposés, la déshumanisation de l’autre partie, l’assimilation de l’effort de guerre à une vertu morale, la croyance que la solution à nos problèmes passe par la victoire : tout cela est la marque de la guerre. Si votre stratégie politique consiste à enflammer l’opinion publique contre des personnalités inexcusables et répréhensibles du monde politique, des entreprises ou de la police, vous faites la guerre. Si vous croyez que les gens de l’autre côté sont moins dotés de sens moral ou éthique, moins conscients ou moins spirituels que vous, vous êtes au bord de la guerre. Alors oui, mettez en lumière les actes qui tuent le monde. Mais ne les attribuez pas à la perfidie des acteurs, et n’imaginez pas que virer les acteurs modifiera les rôles de la pièce de théâtre.

 

6. La polarisation et le déni

J’ai évoqué plus tôt l’affirmation controversée selon laquelle l’épisode chaud médiéval était plus chaud que la période actuelle. J’aimerais revenir sur ce point, non pas parce que je crois qu’il est important de trancher pour l’un ou l’autre, mais parce que cela offre un aperçu du problème plus profond mentionné plus haut de la polarisation, qui coince notre culture dans un status quo sur quasiment toutes les questions importantes, et pas seulement sur le changement climatique.

Les graphiques en crosse de hockey semblent montrer que l’époque actuelle est la plus chaude depuis dix mille ans. D’un autre côté, les climatosceptiques attaquent les fondements méthodologiques et statistiques de ces études, et avancent des preuves de températures chaudes précoces, telles que l’élévation du niveau de la mer au début et au milieu de l’Holocène, et des frontières de flore arborescente situées à des centaines de kilomètres au nord de l’endroit où elles se trouvent aujourd’hui.

Après plusieurs années de recherche bibliographiques, je suis à peu près certain que je peux argumenter les deux côtés de la question. Je peux, à l’aide de nombreuses citations, affirmer que la période de réchauffement médiéval (parfois appelée Anomalie de Température Médiévale) n’était pas vraiment si chaude que ça, et en tout cas principalement concentrée dans l’Atlantique Nord et le bassin méditerranéen. Je peux également affirmer, en citant à nouveau des dizaines d’articles évalués par des pairs, que l’anomalie était importante et affectait toute la planète. Il en va de même pour quasiment tous les aspects du débat sur le climat : j’ai assez d’arguments pour nourrir le débat en faveur de l’un ou l’autre camp.

Il se peut que vos poils commencent à se hérisser de me voir sous-entendre une équivalence entre les deux camps, dont l’un est constitué de pseudo-scientifiques de droite sans scrupules financés par des entreprises qui laissent leur cupidité passer avant la survie de l’humanité, et l’autre de modestes scientifiques intègres soutenus par des institutions autocorrectives validées par des pairs qui veillent à ce que l’avis consensuel de la science se rapproche toujours plus de la vérité. Ou bien est-ce que l’une des parties est constituée de courageux dissidents qui risquent leur carrière pour remettre en question l’orthodoxie régnante, et l’autre de carriéristes incapables de penser individuellement et réticents à prendre de risques, dépendants du programme mondialiste élaboré par ces « écolos » enragés de gauche ?

Les invectives polarisées émanant des deux côtés suggèrent que les égos sont fortement investis dans la défense de chaque posture et je doute que l’une ou l’autre des parties accepterait des preuves qui contredisent leur point de vue. Elles ne peuvent même pas s’entendre sur ce qui constitue un fait. Chacun des nombreux camps, qui vont du catastrophisme à l’alarmisme et au scepticisme, semble occuper son propre silo de réalité. Soumettant toute information contradictoire à un examen hostile, chacun accepte sans poser de questions tout ce qui renforce sa propre position. Par conséquent, quel que soit le camp qui se trompe, il est peu probable qu’il le découvre un jour. Et cela, cher lecteur ou chère lectrice, inclut votre propre camp !

Face à l’extrême polarisation de la société occidentale actuelle, j’ai adopté une règle empirique qui s’applique aussi bien aux couples en guerre qu’à la politique : la question la plus importante se trouve en dehors du champ de bataille, dans ce que les deux parties acceptent ou refusent tacitement de voir. Prendre parti, c’est valider les termes du débat, et garder cachées les questions cachées. Sur quoi les deux parties s’accordent-elles inconsciemment ? Qu’est-ce qui est considéré comme allant de soi ? Quelles sont les questions qui ne sont pas posées ? La férocité du débat occulte-t-elle quelque chose de plus important qui nécessite vraiment notre attention ?

Dans le débat sur le climat, il existe un accord implicite au niveau macro : la réduction de la question de la santé de la planète à la question de savoir si la planète se réchauffe à cause des gaz à effet de serre. En faisant du réchauffement de la planète le signal d’alarme de la détérioration écologique, on sous-entend que si les sceptiques ont raison, alors il n’y a pas lieu de s’alarmer. Dans le paradigme de la Terre Vivante, il y a lieu de s’alarmer, quel que soit le camp qui a raison. Prisonniers du récit du réchauffement incontrôlable, le mouvement pour le climat doit à tout prix prouver que les sceptiques se trompent, même au point de rejeter les preuves de températures élevées au cours de l’histoire, puisque celles-ci ne correspondent pas au récit communément admis.

Chez les alarmistes, le phénomène du réchauffement permet de canaliser un authentique signal d’alarme, celui de la détérioration anthropique de la biosphère et de la condition humaine qui la cause. Quelque chose va terriblement mal ; quelque chose qui implique tous les aspects de nos vies. Malheureusement, le mouvement écologiste s’est en grande partie saisi du réchauffement climatique accéléré comme substitut à ce qui va fondamentalement de travers dans tous les domaines et qui est le véritable objet de sa dissidence. Ce faisant, je crains qu’il n’ait cédé un territoire sacré et qu’il n’ait accepté de positionner la lutte sur un terrain compliqué. Il a remplacé une idée difficile à faire accepter par une autre, plus facile à vendre. Il a mis en avant un récit de peur (le coût du changement climatique) plutôt qu’un récit d’amour (sauver de précieuses forêts). Il a conditionné le soin à apporter à la Terre à l’acceptation d’une théorie aux lourdes résonances politiques qui exige la confiance dans l’institution de la science et dans les systèmes d’autorité qui reposent sur elle. Et ce, à un moment où la confiance globale dans l’autorité est, à juste titre, en déclin.

Quant aux sceptiques, je crains que l’accusation de « négationnisme » soit dans bien des cas exacte. Que l’on puisse ou non formuler des critiques valables à l’égard de la science du climat défendue par l’establishment, la posture sceptique fait généralement partie d’une identité politique plus large qui, pour maintenir sa cohérence, doit écarter tout problème environnemental en même temps que le réchauffement de la planète. S’en tenant à une position selon laquelle tout va bien, les blogs climatosceptiques insistent généralement sur le fait que les déchets plastiques, les déchets radioactifs, les polluants chimiques, la perte de biodiversité, la pollution électromagnétique, les OGM, les pesticides, etc. ne sont pas non plus un problème ; par conséquent, rien n’a besoin de changer.

Saisis par la crainte du profond changement qui s’annonce, les climatosceptiques sont simplement ceux qui le nient de la manière la plus évidente. De manière perverse, le courant dominant à propos du réchauffement climatique perpétue lui aussi une sorte de déni, en défendant une vision dans laquelle la durabilité peut être atteinte simplement en changeant de source d’énergie. L’oxymore courant de « croissance verte » illustre tout à fait cette illusion, car à notre époque la croissance implique la conversion de la nature en ressource, en produit, en argent.

De manière assez perverse, le récit dominant sur le réchauffement climatique facilite le déni en déplaçant l’alerte vers une théorie scientifique qui peut être contestée et dont la preuve ultime ne pourra venir que lorsqu’il sera trop tard. Avec des effets loins dans l’espace et dans le temps, et une causalité également lointaine, il est beaucoup plus facile de nier le changement climatique que de nier, par exemple, que la chasse à la baleine tue les baleines, que la déforestation assèche la terre, que le plastique tue la vie marine, etc. De la même manière, les effets des guérisons écologiques locales sont plus faciles à voir que l’impact sur le climat des panneaux photovoltaïques ou des éoliennes. La distance causale est plus courte et les effets plus tangibles. Par exemple, lorsque les agriculteurs pratiquent la régénération des sols, la nappe phréatique commence à remonter, des sources qui étaient sèches depuis des décennies reviennent à la vie, les cours d’eau recommencent à couler toute l’année, le chant des oiseaux et la faune reviennent. Tout cela peut être observé sans avoir besoin de se fier aux déclarations d’autorités scientifiques.

En outre, si la sincérité et l’intelligence de la plupart des scientifiques individuels ne font aucun doute, la science, en tant qu’institution, est soumise à un biais cognitif collectif qui l’a régulièrement égarée. En témoigne par exemple l’effondrement récent de deux orthodoxies de longue date, presque universellement acceptées : (1) le cholestérol alimentaire et les graisses saturées provoquent l’artériosclérose, et (2) l’évolution se produit uniquement par mutation aléatoire et sélection naturelle (ce qui était un dogme incontestable jusqu’à ce que le transfert horizontal de gènes, l’épigénétique et l’auto-édition de l’ADN soient acceptés). La méfiance du public envers les autorités scientifiques n’est peut-être pas entièrement dénuée de fondement, surtout lorsque la science a si souvent été invoquée pour nous assurer de la sécurité des pesticides, des OGM, des antennes de téléphonie cellulaire et de divers médicaments pharmaceutiques toxiques, pour se révéler erronée par la suite. Cela ne veut pas dire que la science du climat se trompe, mais qu’il vaut mieux ne pas se reposer sur son acceptation par le public, alors que cette acceptation n’est pas nécessaire dans le paradigme de la Terre Vivante. Les élites s’entendent pour attribuer la résistance du public à la science à l’irrationalité et à l’ignorance, et proposent des remèdes condescendants pour corriger celles-ci. La leçon à retenir sur le changement climatique est-elle donc « Nous aurions dû faire confiance aux scientifiques » ? « Nous aurions dû écouter la maîtresse » ? « Nous aurions dû croire la vérité énoncée par les autorités » ?

De nombreux membres de la gauche tiennent la science (en tant qu’institution) pour le dernier bastion de la raison dans une culture par ailleurs dégénérée, un rempart contre la montée de l’irrationalisme. Et si elle était tout aussi défectueuse que nos autres institutions ? Si elle est détrônée en tant qu’arbitre final du bien et du mal, comment se reconnaître en tant que membres de l’Équipe du Bien et se savoir être les porteurs des lumières de la raison en croisade contre une ignorance qui menace le monde entier ?

Ceci n’est pas un appel à l’abandon de la science, mais plutôt à un retour à sa source sacrée : l’humilité. Libérée de son ossification institutionnelle, la science renverserait probablement bon nombre des dogmes établis que ses évangélistes proclament comme des vérités absolues. Je ne suis pas le seul à avoir vécu des expériences que la science qualifie d’inepties impossibles, à avoir bénéficié de modalités de guérison que la science qualifie de charlatanisme, ou à avoir vécu dans des cultures où des phénomènes scientifiquement inacceptables étaient monnaie courante. Cela ne veut pas dire que le récit habituel au sujet du réchauffement climatique est faux. Je n’en sais rien du tout. C’est juste que je ne sais pas non plus s’il est juste. Ce que je pense, c’est qu’il est extrêmement incomplet. C’est pourquoi j’ai tourné mon attention vers ce que je sais, en commençant par la connaissance qui me vient de mes propres pieds nus plantés sur la Terre.

Cette connaissance est la connaissance que la Terre est vivante. De la vision de la Terre Vivante émergent des politiques et des actions qui ont un sens indépendamment de qui a raison dans le débat sur le climat.

 

7. Extinction et finalité

La vision de la Planète Vivante reconnaît un lien intime entre les affaires humaines et écologiques. J’entends souvent les gens dire : « Le changement climatique n’est pas une menace pour la Terre. La planète se portera bien. Seuls les êtres humains pourraient s’éteindre ». Mais si l’on conçoit l’humanité comme la création bien-aimée de Gaïa, née dans un but évolutif, alors on ne peut plus dire qu’elle ira bien sans les humains, tout comme on ne peut dire qu’une mère ira bien si elle perd son enfant. Je suis désolé, mais non, elle n’ira pas bien.

L’idée d’un but évolutif mentionnée plus haut, bien que contraire aux sciences de la biologie moderne, découle naturellement d’une vision du monde, du cosmos où celui-ci est sensible, intelligent ou conscient. Elle ouvre à la question « Pourquoi sommes-nous ici ? » et même « Pourquoi suis-je ici ? » Gaïa a développé un nouvel organe. À quoi sert-il ? Comment l’humanité peut-elle coopérer avec tous les autres organes — les forêts, les eaux, les papillons et les phoques — au service du rêve de la Terre ?

Je ne connais pas les réponses à ces questions. Je sais seulement que nous devons commencer à les poser. Nous le devons, et pas parce que notre survie en dépend. Que ce soit en tant qu’individus ou en tant qu’espèce, on vit pour quelque chose, et si on le néglige, alors notre vitalité, notre vivacité, s’affaiblit. La vie ne nous est pas accordée simplement pour y survivre.

La vie ne nous est pas accordée simplement pour y survivre. Aucun organisme sur Terre ne se contente de survivre. Chacun fait des dons à l’ensemble. C’est pourquoi un écosystème s’affaiblit lorsqu’une espèce lui est enlevée. Dans l’optique de la pure concurrence, une espèce devrait être en meilleure posture lorsque sa concurrente s’éteint, alors qu’en fait sa posture se détériore. Là encore, la vie crée les conditions nécessaires à la vie. Selon ce principe, les humains eux aussi sont là pour faire des dons au reste de la vie ; nous sommes là pour servir la vie. En tant que civilisation, nous avons longtemps fait le contraire. Il faudra donc rien de moins qu’une révolution d’amour totale, un grand renversement.

Par conséquent, des mouvements comme Extinction Rébellion ne peuvent pas prendre uniquement racine dans la survie des humains. Sa rhétorique parle de points de basculement irréversibles, de boucles de rétroaction du méthane, douze ans avant qu’il ne soit trop tard, mais je refuse de croire que c’est de cela qu’il s’agit. Comme je l’ai écrit précédemment, si les températures mondiales cessaient d’augmenter, l’urgence de rébellion n’en serait pas moindre.

Le scénario suivant démontre clairement que l’objet de notre lutte n’est pas réellement la survie de l’espèce humaine. Une possibilité plus terrible se cache derrière la peur par procuration de l’extinction. Supposons que l’on soit capables de continuer à transformer la Terre pour en faire un gigantesque parking, doublé d’une mine à ciel ouvert et d’une décharge. Supposons que l’on remplace le sol par des fermes hydroponiques et des cultures de viande artificielle. Supposons que nos vies migrent intégralement dans des espaces intérieurs au climat contrôlé. Supposons que l’on développe des miroirs spatiaux, des machines qui aspirent le CO2 et des produits chimiques qui blanchissent le ciel pour contrôler les températures du globe. Supposons que l’on poursuive sur la lancée des dix mille dernières années, au cours desquelles chaque génération a laissé la planète un peu moins vivante que la précédente. Et supposons que, comme au cours des dix mille dernières années, la richesse mesurable de l’humanité continue de croître. J’appelle ce scénario le monde bétonné, où la nature est entièrement morte, remplacée par la technologie, et où, branchés sur une simulation numérique de la nature, nous aurions de la peine à nous en rendre compte. Ici, l’extinction n’est pas celle de l’humanité, mais celle de tout le reste. Je vous pose la question : est-ce un avenir acceptable ?

Le mouvement pour le climat a fait de la survie de l’homme l’enjeu principal. C’est une erreur. Voici trois raisons pourquoi :

(1) Cela renforce la mesure de la valeur de la nature selon sa seule utilité pour les êtres humains, ce qui est justement la mentalité qui a si longtemps facilité sa spoliation.

(2) Que cela continue ou non à être vrai, jusqu’à présent l’expérience nous a démontré que les humains survivent très bien pendant que le reste de la vie meurt – il y a de plus en plus d’humains et de moins en moins du reste du vivant.

(3) C’est malhonnête de faire de la survie de l’homme la question centrale, alors que ce n’est pas vraiment ce qui nous motive. Supposons que la survie humaine dans un monde mort soit garantie – va-t-on pousser un soupir de soulagement et se joindre à l’écocide ?

La raison d’être d’Extinction Rébellion est (ou devrait être) le type de monde dans lequel nous voulons vivre, qui nous voulons être, pourquoi nous sommes ici et au service de quoi sommes-nous. La raison d’être d’Extinction Rébellion est de faire un virage et de se mettre au service de toute vie.

Pourquoi voudrait-on servir la vie ? Contrairement à la préservation de soi, ce désir ne peut venir que de l’Amour.

Examinons une autre dimension de l’extinction. J’ai exposé ci-dessus un scénario dans lequel la nature meurt tandis que l’humanité survit. Mais le simple fait d’énoncer ce scénario implique que l’humanité peut être séparée de la nature. Or, nous en sommes inséparables : nous sommes l’expression de la nature. Par conséquent, en réalité on ne peut pas « bien se porter » quand le reste de la vie est en train de mourir. Ce n’est pas nécessairement que l’on ne peut pas survivre quand les autres meurent, mais c’est qu’avec chaque extinction, avec chaque écosystème, chaque lieu et chaque espèce qui disparait, quelque chose de nous-même meurt avec eux. Au fur et à mesure que nos relations s’effritent, notre intégrité se dégrade. Nous pourrions continuer à progresser en termes de PIB, de kilomètres parcourus, d’années vécues, de surface au sol et de climatisation par habitant, de niveau d’éducation, de consommation totale, de téraoctets, de pétaoctets et d’exaoctets, mais ces quantités sans cesse croissantes ne feront que masquer et dévier une faim spirituelle dévorante pour toutes les choses qu’elles ont supplantées : la connexion et l’appartenance, le chant d’un oiseau familier chaque fois un peu différent, l’odeur du printemps, la croissance des bourgeons, le goût d’une framboise gorgée de soleil, les grands-pères qui racontent des histoires sur un endroit que les enfants connaissent bien eux-aussi. Chaque fois que nous faisons un pas de plus vers une chambre d’isolement de notre propre fabrication, notre souffrance s’accentue. Les symptômes de l’extinction sont déjà visibles, dans les taux croissants de dépression, d’anxiété, de suicide, de dépendance, d’automutilation, de violence domestique et d’autres formes de misère qu’aucune richesse matérielle ne peut apaiser.

En d’autres termes, plus la vie sur terre s’amenuise, plus notre âme s’amenuise. En détruisant des êtres, nous détruisons notre propre être. Ne faisant plus partie intégrante d’une toile de relations intimes et mutuelles, ne participant plus à la vie qui nous entoure, encerclés de choses maîtrisées et mortes, nous devenons nous-mêmes moins vivants. Nous devenons des zombies et nous demandons pourquoi nous nous sentons si morts intérieurement. C’est la source suprême des manifestations, qui rassemblent tant de gens. Nous aspirons à retrouver la vie. Nous voulons renverser l’Âge de la Séparation.

Que servons-nous ? Quelle vision de la beauté nous appelle ? C’est la question que l’on doit se poser en passant le portail initiatique appelé changement climatique. En la posant, on invoque une vision collective qui fonde une histoire commune, un accord commun. Je ne pense pas que l’histoire sera la vieille vision d’avenir avec voitures volantes, robots serviteurs et villes sous cloche surplombant un paysage souillé et désertique. Ce sera un avenir où les plages regorgeront à nouveau de coquillages, où l’on verra des baleines par milliers, où des nuées d’oiseaux traverseront le ciel d’un horizon à l’autre, où l’eau des rivières sera propre et où la vie sera revenue dans les endroits aujourd’hui en ruines.

Comment parvenir à un tel avenir ? Je ne le sais pas, mais je peux dire ceci : parce que la cause de la crise écologique implique tous les aspects de nos vies, la solution elle aussi les implique tous. Toute guérison fait partie de la guérison de la Terre. Si l’on doit émettre des revendications, ou peut-être plutôt des invitations, élargissons-les pour inclure tous ceux qui ont besoin de guérison, même et surtout ceux qui ne semblent pas importer : les prisonniers, les démunis, les marginaux, les lieux et les personnes auxquels on ne fait pas attention. L’humanité est aussi un organe de Gaia, et la Terre ne sera jamais en bonne santé si la civilisation ne l’est pas. Le climat social, le climat politique, le climat relationnel, le climat psychique et le climat mondial sont inséparables. Une société qui exploite les personnes les plus vulnérables exploitera nécessairement aussi les lieux les plus vulnérables. Une société conditionnée à la violence qui fait la guerre à d’autres personnes fera sûrement subir la même violence à la Terre. Une société qui déshumanise certains de ses membres dévalorisera toujours également les non humains. Et une société qui se consacre à la guérison à un niveau, en viendra inévitablement à servir la guérison à tous les niveaux.

Tout acte de guérison, aussi petit soit-il, est une prière, une déclaration annonciatrice du monde qui sera. Peut-on se connecter à notre amour pour cette planète vivante, blessée, et canaliser cet amour à travers nos mains et nos esprits, notre technologie et nos arts, en se demandant : Comment allons-nous participer au mieux à la guérison et au rêve de la Terre ?



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Charles Eisenstein

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The Coronation

For years, normality has been stretched nearly to its breaking point, a rope pulled tighter and tighter, waiting for a nip of the black swan’s beak to snap it in two. Now that the rope has snapped, do we tie its ends back together, or shall we undo its dangling braids still further, to see what we might weave from them?

Covid-19 is showing us that when humanity is united in common cause, phenomenally rapid change is possible. None of the world’s problems are technically difficult to solve; they originate in human disagreement. In coherency, humanity’s creative powers are boundless. A few months ago, a proposal to halt commercial air travel would have seemed preposterous. Likewise for the radical changes we are making in our social behavior, economy, and the role of government in our lives. Covid demonstrates the power of our collective will when we agree on what is important. What else might we achieve, in coherency? What do we want to achieve, and what world shall we create? That is always the next question when anyone awakens to their power.

Covid-19 is like a rehab intervention that breaks the addictive hold of normality. To interrupt a habit is to make it visible; it is to turn it from a compulsion to a choice. When the crisis subsides, we might have occasion to ask whether we want to return to normal, or whether there might be something we’ve seen during this break in the routines that we want to bring into the future. We might ask, after so many have lost their jobs, whether all of them are the jobs the world most needs, and whether our labor and creativity would be better applied elsewhere. We might ask, having done without it for a while, whether we really need so much air travel, Disneyworld vacations, or trade shows. What parts of the economy will we want to restore, and what parts might we choose to let go of? And on a darker note, what among the things that are being taken away right now – civil liberties, freedom of assembly, sovereignty over our bodies, in-person gatherings, hugs, handshakes, and public life – might we need to exert intentional political and personal will to restore?

For most of my life, I have had the feeling that humanity was nearing a crossroads. Always, the crisis, the collapse, the break was imminent, just around the bend, but it didn’t come and it didn’t come. Imagine walking a road, and up ahead you see it, you see the crossroads. It’s just over the hill, around the bend, past the woods. Cresting the hill, you see you were mistaken, it was a mirage, it was farther away than you thought. You keep walking. Sometimes it comes into view, sometimes it disappears from sight and it seems like this road goes on forever. Maybe there isn’t a crossroads. No, there it is again! Always it is almost here. Never is it here.

Now, all of a sudden, we go around a bend and here it is. We stop, hardly able to believe that now it is happening, hardly able to believe, after years of confinement to the road of our predecessors, that now we finally have a choice. We are right to stop, stunned at the newness of our situation. Because of the hundred paths that radiate out in front of us, some lead in the same direction we’ve already been headed. Some lead to hell on earth. And some lead to a world more healed and more beautiful than we ever dared believe to be possible.

I write these words with the aim of standing here with you – bewildered, scared maybe, yet also with a sense of new possibility – at this point of diverging paths. Let us gaze down some of them and see where they lead.

* * *

I heard this story last week from a friend. She was in a grocery store and saw a woman sobbing in the aisle. Flouting social distancing rules, she went to the woman and gave her a hug. “Thank you,” the woman said, “that is the first time anyone has hugged me for ten days.”

Going without hugs for a few weeks seems a small price to pay if it will stem an epidemic that could take millions of lives. There is a strong argument for social distancing in the near term: to prevent a sudden surge of Covid cases from overwhelming the medical system. I would like to put that argument in a larger context, especially as we look to the long term. Lest we institutionalize distancing and reengineer society around it, let us be aware of what choice we are making and why.

The same goes for the other changes happening around the coronavirus epidemic. Some commentators have observed how it plays neatly into an agenda of totalitarian control. A frightened public accepts abridgments of civil liberties that are otherwise hard to justify, such as the tracking of everyone’s movements at all times, forcible medical treatment, involuntary quarantine, restrictions on travel and the freedom of assembly, censorship of what the authorities deem to be disinformation, suspension of habeas corpus, and military policing of civilians. Many of these were underway before Covid-19; since its advent, they have been irresistible. The same goes for the automation of commerce; the transition from participation in sports and entertainment to remote viewing; the migration of life from public to private spaces; the transition away from place-based schools toward online education, the decline of brick-and-mortar stores, and the movement of human work and leisure onto screens. Covid-19 is accelerating preexisting trends, political, economic, and social.

While all the above are, in the short term, justified on the grounds of flattening the curve (the epidemiological growth curve), we are also hearing a lot about a “new normal”; that is to say, the changes may not be temporary at all. Since the threat of infectious disease, like the threat of terrorism, never goes away, control measures can easily become permanent. If we were going in this direction anyway, the current justification must be part of a deeper impulse. I will analyze this impulse in two parts: the reflex of control, and the war on death. Thus understood, an initiatory opportunity emerges, one that we are seeing already in the form of the solidarity, compassion, and care that Covid-19 has inspired.

The Reflex of Control

At the current writing, official statistics say that about 25,000 people have died from Covid-19. By the time it runs its course, the death toll could be ten times or a hundred times bigger, or even, if the most alarming guesses are right, a thousand times bigger. Each one of these people has loved ones, family and friends. Compassion and conscience call us to do what we can to avert unnecessary tragedy. This is personal for me: my own infinitely dear but frail mother is among the most vulnerable to a disease that kills mostly the aged and the infirm.

What will the final numbers be? That question is impossible to answer at the time of this writing. Early reports were alarming; for weeks the official number from Wuhan, circulated endlessly in the media, was a shocking 3.4%. That, coupled with its highly contagious nature, pointed to tens of millions of deaths worldwide, or even as many as 100 million. More recently, estimates have plunged as it has become apparent that most cases are mild or asymptomatic. Since testing has been skewed towards the seriously ill, the death rate has looked artificially high. In South Korea, where hundreds of thousands of people with mild symptoms have been tested, the reported case fatality rate is around 1%. In Germany, whose testing also extends to many with mild symptoms, the fatality rate is 0.4%. A recent paper in the journal Science argues that 86% of infections have been undocumented, which points to a much lower mortality rate than the current case fatality rate would indicate.

The story of the Diamond Princess cruise ship bolsters this view. Of the 3,711 people on board, about 20% have tested positive for the virus; less than half of those had symptoms, and eight have died. A cruise ship is a perfect setting for contagion, and there was plenty of time for the virus to spread on board before anyone did anything about it, yet only a fifth were infected. Furthermore, the cruise ship’s population was heavily skewed (as are most cruise ships) toward the elderly: nearly a third of the passengers were over age 70, and more than half were over age 60. A research team concluded from the large number of asymptomatic cases that the true fatality rate in China is around 0.5%. That is still five times higher than flu. Based on the above (and adjusting for much younger demographics in Africa and South and Southeast Asia) my guess is about 200,000-300,000 deaths in the US – more if the medical system is overwhelmed, less if infections are spread out over time – and 3 million globally. Those are serious numbers. Not since the Hong Kong Flu pandemic of 1968/9 has the world experienced anything like it.

My guesses could easily be off by an order of magnitude. Every day the media reports the total number of Covid-19 cases, but no one has any idea what the true number is, because only a tiny proportion of the population has been tested. If tens of millions have the virus, asymptomatically, we would not know it. Further complicating the matter is the high rate of false positives for existing testing, possibly as high as 80%. (And see here for even more alarming uncertainties about test accuracy.) Let me repeat: no one knows what is really happening, including me. Let us be aware of two contradictory tendencies in human affairs. The first is the tendency for hysteria to feed on itself, to exclude data points that don’t play into the fear, and to create the world in its image. The second is denial, the irrational rejection of information that might disrupt normalcy and comfort. As Daniel Schmactenberger asks, How do you know what you believe is true?

In the face of the uncertainty, I’d like to make a prediction: The crisis will play out so that we never will know. If the final death tally, which will itself be the subject of dispute, is lower than feared, some will say that is because the controls worked. Others will say it is because the disease wasn’t as dangerous as we were told.

To me, the most baffling puzzle is why at the present writing there seem to be no new cases in China. The government didn’t initiate its lockdown until well after the virus was established. It should have spread widely during Chinese New Year, when every plane, train, and bus is packed with people traveling all over the country. What is going on here? Again, I don’t know, and neither do you.

Whether the final global death toll is 50,000 or 500,000 or 5 million, let’s look at some other numbers to get some perspective. My point is NOT that Covid isn’t so bad and we shouldn’t do anything. Bear with me. Last year, according to the FAO, five million children worldwide died of hunger (among 162 million who are stunted and 51 million who are wasted). That is 200 times more people than have died so far from Covid-19, yet no government has declared a state of emergency or asked that we radically alter our way of life to save them. Nor do we see a comparable level of alarm and action around suicide – the mere tip of an iceberg of despair and depression – which kills over a million people a year globally and 50,000 in the USA. Or drug overdoses, which kill 70,000 in the USA, the autoimmunity epidemic, which affects 23.5 million (NIH figure) to 50 million (AARDA), or obesity, which afflicts well over 100 million. Why, for that matter, are we not in a frenzy about averting nuclear armageddon or ecological collapse, but, to the contrary, pursue choices that magnify those very dangers?

Please, the point here is not that we haven’t changed our ways to stop children from starving, so we shouldn’t change them for Covid either. It is the contrary: If we can change so radically for Covid-19, we can do it for these other conditions too. Let us ask why are we able to unify our collective will to stem this virus, but not to address other grave threats to humanity. Why, until now, has society been so frozen in its existing trajectory?

The answer is revealing. Simply, in the face of world hunger, addiction, autoimmunity, suicide, or ecological collapse, we as a society do not know what to do. Our go-to crisis responses, all of which are some version of control, aren’t very effective in addressing these conditions. Now along comes a contagious epidemic, and finally we can spring into action. It is a crisis for which control works: quarantines, lockdowns, isolation, hand-washing; control of movement, control of information, control of our bodies. That makes Covid a convenient receptacle for our inchoate fears, a place to channel our growing sense of helplessness in the face of the changes overtaking the world. Covid-19 is a threat that we know how to meet. Unlike so many of our other fears, Covid-19 offers a plan.

Our civilization’s established institutions are increasingly helpless to meet the challenges of our time. How they welcome a challenge that they finally can meet. How eager they are to embrace it as a paramount crisis. How naturally their systems of information management select for the most alarming portrayals of it. How easily the public joins the panic, embracing a threat that the authorities can handle as a proxy for the various unspeakable threats that they cannot.

Today, most of our challenges no longer succumb to force. Our antibiotics and surgery fail to meet the surging health crises of autoimmunity, addiction, and obesity. Our guns and bombs, built to conquer armies, are useless to erase hatred abroad or keep domestic violence out of our homes. Our police and prisons cannot heal the breeding conditions of crime. Our pesticides cannot restore ruined soil. Covid-19 recalls the good old days when the challenges of infectious diseases succumbed to modern medicine and hygiene, at the same time as the Nazis succumbed to the war machine, and nature itself succumbed, or so it seemed, to technological conquest and improvement. It recalls the days when our weapons worked and the world seemed indeed to be improving with each technology of control.

What kind of problem succumbs to domination and control? The kind caused by something from the outside, something Other. When the cause of the problem is something intimate to ourselves, like homelessness or inequality, addiction or obesity, there is nothing to war against. We may try to install an enemy, blaming, for example, the billionaires, Vladimir Putin, or the Devil, but then we miss key information, such as the ground conditions that allow billionaires (or viruses) to replicate in the first place.

If there is one thing our civilization is good at, it is fighting an enemy. We welcome opportunities to do what we are good at, which prove the validity of our technologies, systems, and worldview. And so, we manufacture enemies, cast problems like crime, terrorism, and disease into us-versus-them terms, and mobilize our collective energies toward those endeavors that can be seen that way. Thus, we single out Covid-19 as a call to arms, reorganizing society as if for a war effort, while treating as normal the possibility of nuclear armageddon, ecological collapse, and five million children starving.

The Conspiracy Narrative

Because Covid-19 seems to justify so many items on the totalitarian wish list, there are those who believe it to be a deliberate power play. It is not my purpose to advance that theory nor to debunk it, although I will offer some meta-level comments. First a brief overview.

The theories (there are many variants) talk about Event 201 (sponsored by the Gates Foundation, CIA, etc. last September), and a 2010 Rockefeller Foundation white paper detailing a scenario called “Lockstep,” both of which lay out the authoritarian response to a hypothetical pandemic. They observe that the infrastructure, technology, and legislative framework for martial law has been in preparation for many years. All that was needed, they say, was a way to make the public embrace it, and now that has come. Whether or not current controls are permanent, a precedent is being set for:

  • • The tracking of people’s movements at all times (because coronavirus)
  • • The suspension of freedom of assembly (because coronavirus)
  • • The military policing of civilians (because coronavirus)
  • • Extrajudicial, indefinite detention (quarantine, because coronavirus)
  • • The banning of cash (because coronavirus)
  • • Censorship of the Internet (to combat disinformation, because coronavirus)
  • • Compulsory vaccination and other medical treatment, establishing the state’s sovereignty over our bodies (because coronavirus)
  • • The classification of all activities and destinations into the expressly permitted and the expressly forbidden (you can leave your house for this, but not that), eliminating the un-policed, non-juridical gray zone. That totality is the very essence of totalitarianism. Necessary now though, because, well, coronavirus.

This is juicy material for conspiracy theories. For all I know, one of those theories could be true; however, the same progression of events could unfold from an unconscious systemic tilt toward ever-increasing control. Where does this tilt come from? It is woven into civilization’s DNA. For millennia, civilization (as opposed to small-scale traditional cultures) has understood progress as a matter of extending control onto the world: domesticating the wild, conquering the barbarians, mastering the forces of nature, and ordering society according to law and reason. The ascent of control accelerated with the Scientific Revolution, which launched “progress” to new heights: the ordering of reality into objective categories and quantities, and the mastering of materiality with technology. Finally, the social sciences promised to use the same means and methods to fulfill the ambition (which goes back to Plato and Confucius) to engineer a perfect society.

Those who administer civilization will therefore welcome any opportunity to strengthen their control, for after all, it is in service to a grand vision of human destiny: the perfectly ordered world, in which disease, crime, poverty, and perhaps suffering itself can be engineered out of existence. No nefarious motives are necessary. Of course they would like to keep track of everyone – all the better to ensure the common good. For them, Covid-19 shows how necessary that is. “Can we afford democratic freedoms in light of the coronavirus?” they ask. “Must we now, out of necessity, sacrifice those for our own safety?” It is a familiar refrain, for it has accompanied other crises in the past, like 9/11.

To rework a common metaphor, imagine a man with a hammer, stalking around looking for a reason to use it. Suddenly he sees a nail sticking out. He’s been looking for a nail for a long time, pounding on screws and bolts and not accomplishing much. He inhabits a worldview in which hammers are the best tools, and the world can be made better by pounding in the nails. And here is a nail! We might suspect that in his eagerness he has placed the nail there himself, but it hardly matters. Maybe it isn’t even a nail that’s sticking out, but it resembles one enough to start pounding. When the tool is at the ready, an opportunity will arise to use it.

And I will add, for those inclined to doubt the authorities, maybe this time it really is a nail. In that case, the hammer is the right tool – and the principle of the hammer will emerge the stronger, ready for the screw, the button, the clip, and the tear.

Either way, the problem we deal with here is much deeper than that of overthrowing an evil coterie of Illuminati. Even if they do exist, given the tilt of civilization, the same trend would persist without them, or a new Illuminati would arise to assume the functions of the old.

True or false, the idea that the epidemic is some monstrous plot perpetrated by evildoers upon the public is not so far from the mindset of find-the-pathogen. It is a crusading mentality, a war mentality. It locates the source of a sociopolitical illness in a pathogen against which we may then fight, a victimizer separate from ourselves. It risks ignoring the conditions that make society fertile ground for the plot to take hold. Whether that ground was sown deliberately or by the wind is, for me, a secondary question.

What I will say next is relevant whether or not SARS-CoV2 is a genetically engineered bioweapon, is related to 5G rollout, is being used to prevent “disclosure,” is a Trojan horse for totalitarian world government, is more deadly than we’ve been told, is less deadly than we’ve been told, originated in a Wuhan biolab, originated at Fort Detrick, or is exactly as the CDC and WHO have been telling us. It applies even if everyone is totally wrong about the role of the SARS-CoV-2 virus in the current epidemic. I have my opinions, but if there is one thing I have learned through the course of this emergency is that I don’t really know what is happening. I don’t see how anyone can, amidst the seething farrago of news, fake news, rumors, suppressed information, conspiracy theories, propaganda, and politicized narratives that fill the Internet. I wish a lot more people would embrace not knowing. I say that both to those who embrace the dominant narrative, as well as to those who hew to dissenting ones. What information might we be blocking out, in order to maintain the integrity of our viewpoints? Let’s be humble in our beliefs: it is a matter of life and death.

The War on Death

My 7-year-old son hasn’t seen or played with another child for two weeks. Millions of others are in the same boat. Most would agree that a month without social interaction for all those children a reasonable sacrifice to save a million lives. But how about to save 100,000 lives? And what if the sacrifice is not for a month but for a year? Five years? Different people will have different opinions on that, according to their underlying values.

Let’s replace the foregoing questions with something more personal, that pierces the inhuman utilitarian thinking that turns people into statistics and sacrifices some of them for something else. The relevant question for me is, Would I ask all the nation’s children to forego play for a season, if it would reduce my mother’s risk of dying, or for that matter, my own risk? Or I might ask, Would I decree the end of human hugging and handshakes, if it would save my own life? This is not to devalue Mom’s life or my own, both of which are precious. I am grateful for every day she is still with us. But these questions bring up deep issues. What is the right way to live? What is the right way to die?

The answer to such questions, whether asked on behalf of oneself or on behalf of society at large, depends on how we hold death and how much we value play, touch, and togetherness, along with civil liberties and personal freedom. There is no easy formula to balance these values.

Over my lifetime I’ve seen society place more and more emphasis on safety, security, and risk reduction. It has especially impacted childhood: as a young boy it was normal for us to roam a mile from home unsupervised – behavior that would earn parents a visit from Child Protective Services today. It also manifests in the form of latex gloves for more and more professions; hand sanitizer everywhere; locked, guarded, and surveilled school buildings; intensified airport and border security; heightened awareness of legal liability and liability insurance; metal detectors and searches before entering many sports arenas and public buildings, and so on. Writ large, it takes the form of the security state.

The mantra “safety first” comes from a value system that makes survival top priority, and that depreciates other values like fun, adventure, play, and the challenging of limits. Other cultures had different priorities. For instance, many traditional and indigenous cultures are much less protective of children, as documented in Jean Liedloff’s classic, The Continuum Concept. They allow them risks and responsibilities that would seem insane to most modern people, believing that this is necessary for children to develop self-reliance and good judgement. I think most modern people, especially younger people, retain some of this inherent willingness to sacrifice safety in order to live life fully. The surrounding culture, however, lobbies us relentlessly to live in fear, and has constructed systems that embody fear. In them, staying safe is over-ridingly important. Thus we have a medical system in which most decisions are based on calculations of risk, and in which the worst possible outcome, marking the physician’s ultimate failure, is death. Yet all the while, we know that death awaits us regardless. A life saved actually means a death postponed.

The ultimate fulfillment of civilization’s program of control would be to triumph over death itself. Failing that, modern society settles for a facsimile of that triumph: denial rather than conquest. Ours is a society of death denial, from its hiding away of corpses, to its fetish for youthfulness, to its warehousing of old people in nursing homes. Even its obsession with money and property – extensions of the self, as the word “mine” indicates – expresses the delusion that the impermanent self can be made permanent through its attachments. All this is inevitable given the story-of-self that modernity offers: the separate individual in a world of Other. Surrounded by genetic, social, and economic competitors, that self must protect and dominate in order to thrive. It must do everything it can to forestall death, which (in the story of separation) is total annihilation. Biological science has even taught us that our very nature is to maximize our chances of surviving and reproducing.

I asked a friend, a medical doctor who has spent time with the Q’ero on Peru, whether the Q’ero would (if they could) intubate someone to prolong their life. “Of course not,” she said. “They would summon the shaman to help him die well.” Dying well (which isn’t necessarily the same as dying painlessly) is not much in today’s medical vocabulary. No hospital records are kept on whether patients die well. That would not be counted as a positive outcome. In the world of the separate self, death is the ultimate catastrophe.

But is it? Consider this perspective from Dr. Lissa Rankin: “Not all of us would want to be in an ICU, isolated from loved ones with a machine breathing for us, at risk of dying alone- even if it means they might increase their chance of survival. Some of us might rather be held in the arms of loved ones at home, even if that means our time has come…. Remember, death is no ending. Death is going home.”

When the self is understood as relational, interdependent, even inter-existent, then it bleeds over into the other, and the other bleeds over into the self. Understanding the self as a locus of consciousness in a matrix of relationship, one no longer searches for an enemy as the key to understanding every problem, but looks instead for imbalances in relationships. The War on Death gives way to the quest to live well and fully, and we see that fear of death is actually fear of life. How much of life will we forego to stay safe?

Totalitarianism – the perfection of control – is the inevitable end product of the mythology of the separate self. What else but a threat to life, like a war, would merit total control? Thus Orwell identified perpetual war as a crucial component of the Party’s rule.

Against the backdrop of the program of control, death denial, and the separate self, the assumption that public policy should seek to minimize the number of deaths is nearly beyond question, a goal to which other values like play, freedom, etc. are subordinate. Covid-19 offers occasion to broaden that view. Yes, let us hold life sacred, more sacred than ever. Death teaches us that. Let us hold each person, young or old, sick or well, as the sacred, precious, beloved being that they are. And in the circle of our hearts, let us make room for other sacred values too. To hold life sacred is not just to live long, it is to live well and right and fully.

Like all fear, the fear around the coronavirus hints at what might lie beyond it. Anyone who has experienced the passing of someone close knows that death is a portal to love. Covid-19 has elevated death to prominence in the consciousness of a society that denies it. On the other side of the fear, we can see the love that death liberates. Let it pour forth. Let it saturate the soil of our culture and fill its aquifers so that it seeps up through the cracks of our crusted institutions, our systems, and our habits. Some of these may die too.

What world shall we live in?

How much of life do we want to sacrifice at the altar of security? If it keeps us safer, do we want to live in a world where human beings never congregate? Do we want to wear masks in public all the time? Do we want to be medically examined every time we travel, if that will save some number of lives a year? Are we willing to accept the medicalization of life in general, handing over final sovereignty over our bodies to medical authorities (as selected by political ones)? Do we want every event to be a virtual event? How much are we willing to live in fear?

Covid-19 will eventually subside, but the threat of infectious disease is permanent. Our response to it sets a course for the future. Public life, communal life, the life of shared physicality has been dwindling over several generations. Instead of shopping at stores, we get things delivered to our homes. Instead of packs of kids playing outside, we have play dates and digital adventures. Instead of the public square, we have the online forum. Do we want to continue to insulate ourselves still further from each other and the world?

It is not hard to imagine, especially if social distancing is successful, that Covid-19 persists beyond the 18 months we are being told to expect for it to run its course. It is not hard to imagine that new viruses will emerge during that time. It is not hard to imagine that emergency measures will become normal (so as to forestall the possibility of another outbreak), just as the state of emergency declared after 9/11 is still in effect today. It is not hard to imagine that (as we are being told), reinfection is possible, so that the disease will never run its course. That means that the temporary changes in our way of life may become permanent.

To reduce the risk of another pandemic, shall we choose to live in a society without hugs, handshakes, and high-fives, forever more? Shall we choose to live in a society where we no longer gather en masse? Shall the concert, the sports competition, and the festival be a thing of the past? Shall children no longer play with other children? Shall all human contact be mediated by computers and masks? No more dance classes, no more karate classes, no more conferences, no more churches? Is death reduction to be the standard by which to measure progress? Does human advancement mean separation? Is this the future?

The same question applies to the administrative tools required to control the movement of people and the flow of information. At the present writing, the entire country is moving toward lockdown. In some countries, one must print out a form from a government website in order to leave the house. It reminds me of school, where one’s location must be authorized at all times. Or of prison. Do we envision a future of electronic hall passes, a system where freedom of movement is governed by state administrators and their software at all times, permanently? Where every movement is tracked, either permitted or prohibited? And, for our protection, where information that threatens our health (as decided, again, by various authorities) is censored for our own good? In the face of an emergency, like unto a state of war, we accept such restrictions and temporarily surrender our freedoms. Similar to 9/11, Covid-19 trumps all objections.

For the first time in history, the technological means exist to realize such a vision, at least in the developed world (for example, using cellphone location data to enforce social distancing; see also here). After a bumpy transition, we could live in a society where nearly all of life happens online: shopping, meeting, entertainment, socializing, working, even dating. Is that what we want? How many lives saved is that worth?

I am sure that many of the controls in effect today will be partially relaxed in a few months. Partially relaxed, but at the ready. As long as infectious disease remains with us, they are likely to be reimposed, again and again, in the future, or be self-imposed in the form of habits. As Deborah Tannen says, contributing to a Politico article on how coronavirus will change the world permanently, ‘We know now that touching things, being with other people and breathing the air in an enclosed space can be risky…. It could become second nature to recoil from shaking hands or touching our faces—and we may all fall heir to society-wide OCD, as none of us can stop washing our hands.” After thousands of years, millions of years, of touch, contact, and togetherness, is the pinnacle of human progress to be that we cease such activities because they are too risky?

Life is Community

The paradox of the program of control is that its progress rarely advances us any closer to its goal. Despite security systems in almost every upper middle-class home, people are no less anxious or insecure than they were a generation ago. Despite elaborate security measures, the schools are not seeing fewer mass shootings. Despite phenomenal progress in medical technology, people have if anything become less healthy over the past thirty years, as chronic disease has proliferated and life expectancy stagnated and, in the USA and Britain, started to decline.

The measures being instituted to control Covid-19, likewise, may end up causing more suffering and death than they prevent. Minimizing deaths means minimizing the deaths that we know how to predict and measure. It is impossible to measure the added deaths that might come from isolation-induced depression, for instance, or the despair caused by unemployment, or the lowered immunity and deterioration in health that chronic fear can cause. Loneliness and lack of social contact has been shown to increase inflammation, depression, and dementia. According to Lissa Rankin, M.D., air pollution increases risk of dying by 6%, obesity by 23%, alcohol abuse by 37%, and loneliness by 45%.

Another danger that is off the ledger is the deterioration in immunity caused by excessive hygiene and distancing. It is not only social contact that is necessary for health, it is also contact with the microbial world. Generally speaking, microbes are not our enemies, they are our allies in health. A diverse gut biome, comprising bacteria, viruses, yeasts, and other organisms, is essential for a well-functioning immune system, and its diversity is maintained through contact with other people and with the world of life. Excessive hand-washing, overuse of antibiotics, aseptic cleanliness, and lack of human contact might do more harm than good. The resulting allergies and autoimmune disorders might be worse than the infectious disease they replace. Socially and biologically, health comes from community. Life does not thrive in isolation.

Seeing the world in us-versus-them terms blinds us to the reality that life and health happen in community. To take the example of infectious diseases, we fail to look beyond the evil pathogen and ask, What is the role of viruses in the microbiome? (See also here.) What are the body conditions under which harmful viruses proliferate? Why do some people have mild symptoms and others severe ones (besides the catch-all non-explanation of “low resistance”)? What positive role might flus, colds, and other non-lethal diseases play in the maintenance of health?

War-on-germs thinking brings results akin to those of the War on Terror, War on Crime, War on Weeds, and the endless wars we fight politically and interpersonally. First, it generates endless war; second, it diverts attention from the ground conditions that breed illness, terrorism, crime, weeds, and the rest.

Despite politicians’ perennial claim that they pursue war for the sake of peace, war inevitably breeds more war. Bombing countries to kill terrorists not only ignores the ground conditions of terrorism, it exacerbates those conditions. Locking up criminals not only ignores the conditions that breed crime, it creates those conditions when it breaks up families and communities and acculturates the incarcerated to criminality. And regimes of antibiotics, vaccines, antivirals, and other medicines wreak havoc on body ecology, which is the foundation of strong immunity. Outside the body, the massive spraying campaigns sparked by Zika, Dengue Fever, and now Covid-19 will visit untold damage upon nature’s ecology. Has anyone considered what the effects on the ecosystem will be when we douse it with antiviral compounds? Such a policy (which has been implemented in various places in China and India) is only thinkable from the mindset of separation, which does not understand that viruses are integral to the web of life.

To understand the point about ground conditions, consider some mortality statistics from Italy (from its National Health Institute), based on an analysis of hundreds of Covid-19 fatalities. Of those analyzed, less than 1% were free of serious chronic health conditions. Some 75% suffered from hypertension, 35% from diabetes, 33% from cardiac ischemia, 24% from atrial fibrillation, 18% from low renal function, along with other conditions that I couldn’t decipher from the Italian report. Nearly half the deceased had three or more of these serious pathologies. Americans, beset by obesity, diabetes, and other chronic ailments, are at least as vulnerable as Italians. Should we blame the virus then (which killed few otherwise healthy people), or shall we blame underlying poor health? Here again the analogy of the taut rope applies. Millions of people in the modern world are in a precarious state of health, just waiting for something that would normally be trivial to send them over the edge. Of course, in the short term we want to save their lives; the danger is that we lose ourselves in an endless succession of short terms, fighting one infectious disease after another, and never engage the ground conditions that make people so vulnerable. That is a much harder problem, because these ground conditions will not change via fighting. There is no pathogen that causes diabetes or obesity, addiction, depression, or PTSD. Their causes are not an Other, not some virus separate from ourselves, and we its victims.

Even in diseases like Covid-19, in which we can name a pathogenic virus, matters are not so simple as a war between virus and victim. There is an alternative to the germ theory of disease that holds germs to be part of a larger process. When conditions are right, they multiply in the body, sometimes killing the host, but also, potentially, improving the conditions that accommodated them to begin with, for example by cleaning out accumulated toxic debris via mucus discharge, or (metaphorically speaking) burning them up with fever. Sometimes called “terrain theory,” it says that germs are more symptom than cause of disease. As one meme explains it: “Your fish is sick. Germ theory: isolate the fish. Terrain theory: clean the tank.”

A certain schizophrenia afflicts the modern culture of health. On the one hand, there is a burgeoning wellness movement that embraces alternative and holistic medicine. It advocates herbs, meditation, and yoga to boost immunity. It validates the emotional and spiritual dimensions of health, such as the power of attitudes and beliefs to sicken or to heal. All of this seems to have disappeared under the Covid tsunami, as society defaults to the old orthodoxy.

Case in point: California acupuncturists have been forced to shut down, having been deemed “non-essential.” This is perfectly understandable from the perspective of conventional virology. But as one acupuncturist on Facebook observed, “What about my patient who I’m working with to get off opioids for his back pain? He’s going to have to start using them again.” From the worldview of medical authority, alternative modalities, social interaction, yoga classes, supplements, and so on are frivolous when it comes to real diseases caused by real viruses. They are relegated to an etheric realm of “wellness” in the face of a crisis. The resurgence of orthodoxy under Covid-19 is so intense that anything remotely unconventional, such as intravenous vitamin C, was completely off the table in the United States until two days ago (articles still abound “debunking” the “myth” that vitamin C can help fight Covid-19). Nor have I heard the CDC evangelize the benefits of elderberry extract, medicinal mushrooms, cutting sugar intake, NAC (N-acetyl L-cysteine), astragalus, or vitamin D. These are not just mushy speculation about “wellness,” but are supported by extensive research and physiological explanations. For example, NAC (general info, double-blind placebo-controlled study) has been shown to radically reduce incidence and severity of symptoms in flu-like illnesses.

As the statistics I offered earlier on autoimmunity, obesity, etc. indicate, America and the modern world in general are facing a health crisis. Is the answer to do what we’ve been doing, only more thoroughly? The response so far to Covid has been to double down on the orthodoxy and sweep unconventional practices and dissenting viewpoints aside. Another response would be to widen our lens and examine the entire system, including who pays for it, how access is granted, and how research is funded, but also expanding out to include marginal fields like herbal medicine, functional medicine, and energy medicine. Perhaps we can take this opportunity to reevaluate prevailing theories of illness, health, and the body. Yes, let’s protect the sickened fish as best we can right now, but maybe next time we won’t have to isolate and drug so many fish, if we can clean the tank.

I’m not telling you to run out right now and buy NAC or any other supplement, nor that we as a society should abruptly shift our response, cease social distancing immediately, and start taking supplements instead. But we can use the break in normal, this pause at a crossroads, to consciously choose what path we shall follow moving forward: what kind of healthcare system, what paradigm of health, what kind of society. This reevaluation is already happening, as ideas like universal free healthcare in the USA gain new momentum. And that path leads to forks as well. What kind of healthcare will be universalized? Will it be merely available to all, or mandatory for all – each citizen a patient, perhaps with an invisible ink barcode tattoo certifying one is up to date on all compulsory vaccines and check-ups. Then you can go to school, board a plane, or enter a restaurant. This is one path to the future that is available to us.

Another option is available now too. Instead of doubling down on control, we could finally embrace the holistic paradigms and practices that have been waiting on the margins, waiting for the center to dissolve so that, in our humbled state, we can bring them into the center and build a new system around them.

The Coronation

There is an alternative to the paradise of perfect control that our civilization has so long pursued, and that recedes as fast as our progress, like a mirage on the horizon. Yes, we can proceed as before down the path toward greater insulation, isolation, domination, and separation. We can normalize heightened levels of separation and control, believe that they are necessary to keep us safe, and accept a world in which we are afraid to be near each other. Or we can take advantage of this pause, this break in normal, to turn onto a path of reunion, of holism, of the restoring of lost connections, of the repair of community and the rejoining of the web of life.

Do we double down on protecting the separate self, or do we accept the invitation into a world where all of us are in this together? It isn’t just in medicine we encounter this question: it visits us politically, economically, and in our personal lives as well. Take for example the issue of hoarding, which embodies the idea, “There won’t be enough for everyone, so I am going to make sure there is enough for me.” Another response might be, “Some don’t have enough, so I will share what I have with them.” Are we to be survivalists or helpers? What is life for?

On a larger scale, people are asking questions that have until now lurked on activist margins. What should we do about the homeless? What should we do about the people in prisons? In Third World slums? What should we do about the unemployed? What about all the hotel maids, the Uber drivers, the plumbers and janitors and bus drivers and cashiers who cannot work from home? And so now, finally, ideas like student debt relief and universal basic income are blossoming. “How do we protect those susceptible to Covid?” invites us into “How do we care for vulnerable people in general?”

That is the impulse that stirs in us, regardless of the superficialities of our opinions about Covid’s severity, origin, or best policy to address it. It is saying, let’s get serious about taking care of each other. Let’s remember how precious we all are and how precious life is. Let’s take inventory of our civilization, strip it down to its studs, and see if we can build one more beautiful.

As Covid stirs our compassion, more and more of us realize that we don’t want to go back to a normal so sorely lacking it. We have the opportunity now to forge a new, more compassionate normal.

Hopeful signs abound that this is happening. The United States government, which has long seemed the captive of heartless corporate interests, has unleashed hundreds of billions of dollars in direct payments to families. Donald Trump, not known as a paragon of compassion, has put a moratorium on foreclosures and evictions. Certainly one can take a cynical view of both these developments; nonetheless, they embody the principle of caring for the vulnerable.

From all over the world we hear stories of solidarity and healing. One friend described sending $100 each to ten strangers who were in dire need. My son, who until a few days ago worked at Dunkin’ Donuts, said people were tipping at five times the normal rate – and these are working class people, many of them Hispanic truck drivers, who are economically insecure themselves. Doctors, nurses, and “essential workers” in other professions risk their lives to serve the public. Here are some more examples of the love and kindness eruption, courtesy of ServiceSpace:

Perhaps we’re in the middle of living into that new story. Imagine Italian airforce using Pavoratti, Spanish military doing acts of service, and street police playing guitars — to *inspire*. Corporations giving unexpected wage hikes. Canadians starting “Kindness Mongering.” Six year old in Australia adorably gifting her tooth fairy money, an 8th grader in Japan making 612 masks, and college kids everywhere buying groceries for elders. Cuba sending an army in “white robes” (doctors) to help Italy. A landlord allowing tenants to stay without rent, an Irish priest’s poem going viral, disabled activitists producing hand sanitizer. Imagine. Sometimes a crisis mirrors our deepest impulse — that we can always respond with compassion.

As Rebecca Solnit describes in her marvelous book, A Paradise Built in Hell, disaster often liberates solidarity. A more beautiful world shimmers just beneath the surface, bobbing up whenever the systems that hold it underwater loosen their grip.

For a long time we, as a collective, have stood helpless in the face of an ever-sickening society. Whether it is declining health, decaying infrastructure, depression, suicide, addiction, ecological degradation, or concentration of wealth, the symptoms of civilizational malaise in the developed world are plain to see, but we have been stuck in the systems and patterns that cause them. Now, Covid has gifted us a reset.

A million forking paths lie before us. Universal basic income could mean an end to economic insecurity and the flowering of creativity as millions are freed from the work that Covid has shown us is less necessary than we thought. Or it could mean, with the decimation of small businesses, dependency on the state for a stipend that comes with strict conditions. The crisis could usher in totalitarianism or solidarity; medical martial law or a holistic renaissance; greater fear of the microbial world, or greater resiliency in participation in it; permanent norms of social distancing, or a renewed desire to come together.

What can guide us, as individuals and as a society, as we walk the garden of forking paths? At each junction, we can be aware of what we follow: fear or love, self-preservation or generosity. Shall we live in fear and build a society based on it? Shall we live to preserve our separate selves? Shall we use the crisis as a weapon against our political enemies? These are not all-or-nothing questions, all fear or all love. It is that a next step into love lies before us. It feels daring, but not reckless. It treasures life, while accepting death. And it trusts that with each step, the next will become visible.

Please don’t think that choosing love over fear can be accomplished solely through an act of will, and that fear too can be conquered like a virus. The virus we face here is fear, whether it is fear of Covid-19, or fear of the totalitarian response to it, and this virus too has its terrain. Fear, along with addiction, depression, and a host of physical ills, flourishes in a terrain of separation and trauma: inherited trauma, childhood trauma, violence, war, abuse, neglect, shame, punishment, poverty, and the muted, normalized trauma that affects nearly everyone who lives in a monetized economy, undergoes modern schooling, or lives without community or connection to place. This terrain can be changed, by trauma healing on a personal level, by systemic change toward a more compassionate society, and by transforming the basic narrative of separation: the separate self in a world of other, me separate from you, humanity separate from nature. To be alone is a primal fear, and modern society has rendered us more and more alone. But the time of Reunion is here. Every act of compassion, kindness, courage, or generosity heals us from the story of separation, because it assures both actor and witness that we are in this together.

I will conclude by invoking one more dimension of the relationship between humans and viruses. Viruses are integral to evolution, not just of humans but of all eukaryotes. Viruses can transfer DNA from organism to organism, sometimes inserting it into the germline (where it becomes heritable). Known as horizontal gene transfer, this is a primary mechanism of evolution, allowing life to evolve together much faster than is possible through random mutation. As Lynn Margulis once put it, we are our viruses.

And now let me venture into speculative territory. Perhaps the great diseases of civilization have quickened our biological and cultural evolution, bestowing key genetic information and offering both individual and collective initiation. Could the current pandemic be just that? Novel RNA codes are spreading from human to human, imbuing us with new genetic information; at the same time, we are receiving other, esoteric, “codes” that ride the back of the biological ones, disrupting our narratives and systems in the same way that an illness disrupts bodily physiology. The phenomenon follows the template of initiation: separation from normality, followed by a dilemma, breakdown, or ordeal, followed (if it is to be complete) by reintegration and celebration.

Now the question arises: Initiation into what? What is the specific nature and purpose of this initiation?The popular name for the pandemic offers a clue: coronavirus. A corona is a crown. “Novel coronavirus pandemic” means “a new coronation for all.”

Already we can feel the power of who we might become. A true sovereign does not run in fear from life or from death. A true sovereign does not dominate and conquer (that is a shadow archetype, the Tyrant). The true sovereign serves the people, serves life, and respects the sovereignty of all people. The coronation marks the emergence of the unconscious into consciousness, the crystallization of chaos into order, the transcendence of compulsion into choice. We become the rulers of that which had ruled us. The New World Order that the conspiracy theorists fear is a shadow of the glorious possibility available to sovereign beings. No longer the vassals of fear, we can bring order to the kingdom and build an intentional society on the love already shining through the cracks of the world of separation.

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